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L’affaire du passeport diplomatique de Fahmi Saïd Ibrahim

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Un geste inutile et qui en dit long sur les convulsions volcaniques du crypto-sambisme

«La chèvre était un peu loin, à l’écart, quand elle vit Dieu au beau milieu d’animaux. Sans savoir de quoi il s’agissait, la chèvre commença à crier: “Moi, aussi! Moi, aussi! Moi, aussi”. Et c’est ainsi que la chèvre se retrouva dans la catégorie des animaux destinés à l’abattage et à la consommation des hommes, catégorie à laquelle elle n’était pas destinée au départ. Elle a dit “Moi, aussi! Moi, aussi! Moi, aussi”, sans savoir de quoi il s’agissait, sans savoir dans quoi elle s’engageait, sans savoir que son geste allait lui coûter bon, puisqu’elle n’avait même pas cherché à savoir pourquoi Dieu avait réuni les animaux qu’elle voyait de loin, sans entendre ce que Dieu disait». Cette anecdote impossible est inventée de toutes pièces par les Mohéliens, des gens connus pour la fertilité de leur imagination et pour leur capacité à inventer des histoires sans fondements et souvent tirées par les cheveux. Pourtant, leur histoire sur Dieu et la chèvre a des applications humaines et surtout sur la scène politique comorienne. Justement, on nous dit, et la chose s’est avérée vraie après vérification à la rue Marbeau dans le 6ème arrondissement de Paris, que Maître Fahmi Saïd Ibrahim, Député de «l’opposition républicaine» à l’Assemblée de l’Union des Comores, Président du Parti de l’Entente comorienne (PEC) et un des 1.000 candidats à l’élection présidentielle de 2016, a rendu son passeport diplomatique à l’Ambassade des Comores à Paris. La nouvelle, tout à fait surréaliste, a été murmurée, chuchotée et commentée ici et là, et n’a pas manqué de faire rire beaucoup de monde parce que cette restitution pose au moins deux problèmes logiques: d’une part, personne n’avait demandé à Maître Fahmi Saïd Ibrahim de rendre son passeport diplomatique, et il l’a rendu quand même, en le faisant savoir, alors qu’il s’agit d’un geste personnel, étant entendu que le jour où il l’avait pris, il ne l’avait dit à personne, et personne ne lui avait posé de questions sur le sujet, dans la mesure où c’est une affaire qui ne regarde que lui et lui seul. D’autre part, s’il voulait rendre son passeport diplomatique, ce n’est pas à la mission diplomatique comorienne à Paris qu’il devait le faire, puisque celle-ci n’est pas l’administration qui le lui a délivré, mais au ministère des Relations extérieures, à Moroni, qui l’a fait, en conformité avec la règle selon laquelle les anciens chefs de la diplomatie comorienne ont droit au zinzin en papier. Donc, la démarche, en plus d’être inopportune et démagogique, est très maladroite et inappropriée, et d’une incongruité hautement suspecte, surtout qu’elle est entreprise par un juriste, un juriste qui aime qu’on sache qu’il est juriste. Ce qui est son droit. Normalement, le principe du parallélisme des formes s’imposait à Maître Fahmi Saïd Ibrahim pour que ça soit l’administration qui a délivré le passeport diplomatique soit celle qui le reçoit, conformément à la vieille règle mohélienne selon laquelle, «affaire mouton, cabri n’entre pas». On revient donc aux chèvres. Il n’y a pas un seul étudiant en première année dans une Faculté de Droit qui ignore la valeur d’un tel principe juridique.

   S’agissant des raisons qui ont conduit le cher Député de «l’opposition républicaine» à son geste suranné et incongru, il est impossible de ne pas les lier aux confusions politiques et diplomatiques actuelles autour d’Ahmed Sambi, dont on parle beaucoup en ce moment, qu’il s’agisse de ses déboires à Dubaï, ou du fait que le retrait de son passeport diplomatique est ouvertement évoqué par le ministre Houmed Msaidié depuis que l’ancien Président s’est servi du fameux document administratif pour couvrir de honte l’État et la République des Comores à la Présidence de la République malgache, où il s’était fait admettre sans y être invité, faisant ridiculiser toutes les Comores par une vantardise de gamin boutonneux et gommeux dans une cour de récréation. Bon Prince, dans un geste de grand Seigneur mais à l’utilité douteuse, Maître Fahmi Saïd Ibrahim a donc remis son passeport diplomatique et argue du fait qu’il veut éviter l’humiliation de se voir retirer son engin à son arrivée aux Comores, même si la menace pèse sur Ahmed Sambi et sans que son nom à lui, Maître Fahmi Saïd Ibrahim, ne soit évoqué une seule fois. En tout état de cause, le geste du Président du PEC est intervenu à un moment où les autorités comoriennes sont soucieuses de mettre de l’ordre dans le dossier des passeports diplomatiques, souvent géré au petit bonheur la chance. L’argument est rachitique et rabougri parce que Maître Fahmi Saïd Ibrahim, en sa qualité d’ancien ministre des Relations extérieures (sous la présidence de son ami et allié Ahmed Sambi en 2010-2011), a droit à un passeport diplomatique, n’est menacé par personne et est l’ami de Houmed Msaidié, le ministre qui donne des rages de dents aux crypto-sambistes et les pousse chaque jour à des erreurs qu’une personne prudente devrait éviter. Après avoir rendu son passeport diplomatique, Maître Fahmi Saïd Ibrahim a pu quitter la France muni de son passeport français, même si la vox populi a prétendu que c’est avec un laissez-passer qu’il a effectué son voyage de retour, sans pouvoir passer par Madagascar, où il voulait se rendre. Ce sont des sornettes. L’Ambassade des Comores en France est catégorique: elle n’a établi aucun laissez-passer au nom de Maître Fahmi Saïd Ibrahim qui, dans l’affaire, fait tout pour jouer le beau rôle, celui de la victime d’un régime politique qui s’en prend à ses opposants.

   Pour autant, dans l’affaire, il faudra que les Comoriens se disent la vérité. Dans moins d’une année, aura lieu l’élection présidentielle comorienne. Le samedi 16 mai 2016, on a assisté au plus ridicule des spectacles, à Paris, quand certains ont fait d’Ahmed Sambi leur candidat pour 2016, tout en pensant au jour où le même Ahmed Sambi sera définitivement déclaré inapte à la course présidentielle pour que les fidèles compagnons du Guide suprême s’étripent sur la place publique, chacun cherchant à être le candidat de ce dernier, pour son argent. À ce jeu-là, le frère Achiraf Saïd-Hachim a une longueur d’avance sur les autres puisqu’il a déjà proclamé l’invalidation de la candidature d’Ahmed Sambi, son statut de chef de l’opposition et sa qualité de candidat unique de cette même «opposition républicaine». Donc, en rendant son passeport à Paris comme il l’a fait, Maître Fahmi Saïd Ibrahim devance les problèmes et les ordres d’Ahmed Sambi et prouve que si ce dernier mourrait aujourd’hui, il serait prêt à entrer vivant dans son cercueil pour être enterré avec lui, rien que pour lui prouver sa «fidélité», pour d’évidentes raisons politiciennes et électoralistes sans rapport avec l’amitié et la vraie fidélité. L’homme d’Itsandra sait ce qu’il fait, et compte toucher les dividendes politiques de sa «fidélité», en espérant que les choses se passeront mieux que quand le même Ahmed Sambi était parti conclure son alliance avec le Gouverneur Mouigni Baraka de la Grande-Comore sans même le consulter et l’associer à la démarche comme cela se doit entre personnes bien élevées. Au cours des mois à venir, il se passera beaucoup de choses, et la crise socioéconomique du pays sera oubliée tant les agissements des acteurs politiques vont verser dans le pathétique et provoquer une épidémie de rires et rigolades.

Par ARM

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© www.lemohelien.com – Mardi 9 juin 2015.


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