Zigzags, duplicité et contorsions politiques à Mohéli
Comme Halima, les Mohéliens retrouvent leurs vieilles habitudes
Par ARM
Le savez-vous? Les femmes mohéliennes aiment porter des bermudas, et quand on est en période électorale, on assiste à une explosion du bermuda à Mohéli. Pourquoi? Parce que le bermuda est un instrument politique et électoral. Le bermuda est porté surtout pour entrer dans les basses-cours pour mobiliser l’électorat, y compris aux abords des bureaux de vote, les jours de vote afin de bien se rendre compte que ceux qui disent avoir été «motivés» sont bien «motivés» et qu’ils vont rapporter les bulletins de vote des candidats adverses, contre qui ils sont censés avoir voté. Pour faire les choses en grand, les superviseuses portent donc leurs bermudas pour pouvoir être très combattives.
À Mohéli, on connaît les quartiers dont les habitants respectent les consignes de vote après avoir été «motivés» et ceux qui jouent à la fille de l’air électorale après avoir été «motivés». Mais, explique ce connaisseur des combines électorales mohéliennes, «quand on est un politicien prudent, on ne donne jamais de l’argent à un électeur et à une électrice de la partie adverse dans l’espoir de les faire changer de camp politique. Ils ont déjà choisi leur camp; l’argent, on le donne à ceux dont on est sûr du vote, dans le seul but de les fidéliser. Lors de l’élection présidentielle de 2010, j’ai vu le colistier grand-comorien d’un candidat mohélien pleurer dans un bureau ici à Fomboni, après avoir entendu son candidat lui réclamer de l’argent en plus, alors qu’il lui avait remis un cash de 50 millions de francs comoriens, soit 100 millions d’euros, envolés comme une fumée de cuisine. Le pauvre colistier ne comprenait pas les malheurs qui lui arrivaient, et quand son ticket a été relégué à la plus humiliante des places, il avait perdu jusqu’à la voix, clignait des yeux, ouvrait et refermait la bouche sans pouvoir émettre un seul son. Vous voulez savoir ce qui s’était passé? Je vais vous le dire. Les gens qui distribuaient l’argent au peuple l’avaient gardé pour eux et n’avaient distribué que des misérables miettes. Il faut se méfier des Mohéliens en période électorale. Ils sont capables des pires coups bas. C’était du cinéma à l’état pur. Je constate que la même comédie est en train de se reproduire depuis quelques semaines».
Et s’il n’y avait que ce genre de magouilles… Oui, à Mohéli, il se passe trop de choses en ce moment. Pour preuve, la notion de partis politiques a volé en éclats à Mohéli. C’est ainsi qu’il n’est pas rare de voir des Mohéliens soutenir le candidat d’un parti politique pour l’élection gubernatoriale et celui d’une autre organisation politique à l’élection présidentielle. En d’autres termes, on fait des choix de personnes et non des choix de partis politiques. Mais, attention! Il ne faut pas croire que les Mohéliens sont les seuls mauvais bougres dans l’affaire, puisqu’il a été constaté qu’il y a un parti politique qui soutient trois candidats à l’élection gubernatoriale de Mohéli. Et ceux qui se livrent à ce petit sport ne sont pas des Mohéliens, bien au contraire. La chose avait déjà été constatée en 2010, mais en 2015-2016, ce jeu de duplicité prend des proportions particulières parce que le doute s’est installé dans les esprits dans certains partis politiques qui s’étaient sentis obligés de soutenir un candidat qui, visiblement, ne fait pas le poids, et qui se retrouvent dans l’obligation de recourir à des expédients électoraux.
Et il est un candidat qui fait beaucoup parler de lui en ce moment: l’inévitable Mohamed Saïd Fazul. Ses adversaires sont très jaloux de lui depuis qu’il a reçu une importante aide financière en provenance de Mayotte. Ce cacique d’un parti adverse dit de lui: «D’accord, Mohamed Saïd Fazul est très gentil et sympathique. D’accord, il va manger par terre avec le citoyen lambda, chez ce dernier. D’accord, il est en train de faire revenir dans sa case politique une partie de ses partisans qui avaient été vus aux côtés du Gouverneur Mohamed Ali Saïd ces derniers temps. Mais, il en fait trop. Avec ses méthodes de boulanger, il continue à rouler dans la farine toute la classe politique mohélienne. Parlons de ses histoires de Mayotte. Il a dit à Mayotte qu’il était le seul candidat de l’opposition aux élections du Gouverneur de Mohéli. Or, que constatent les gens venus de Mayotte lui apporter l’argent? Eh bien, ces gens viennent de se rendre compte que le boulanger de Mohéli vient de rouler dans la farine Mohéli et Mayotte parce que les candidats de l’opposition, ce n’est pas ce qui manque à Mohéli. Ils ont mis à la disposition de l’ancien Président de l’île autonome de Mohéli 40 millions de francs comoriens, mais ont pris la précaution élémentaire de constituer un comité qui va gérer cette manne. Mohamed Saïd Fazul prend mal la chose, considérant qu’il s’agit d’une méfiance envers sa personne qu’il ne mérite pas, lui qui se dit un gestionnaire bon père de famille. En réalité, son principal défaut en période électorale, c’est sa radinerie, même en présence d’une somme d’argent provenant de soutiens politiques et financiers pour lui faire gagner une élection. S’il pouvait ne pas être avare en période électorale, ça serait très bien pour lui».
Et comme les Mohéliens sont abonnés à la théorie du complot et à la complotite aiguë, nombreux parmi eux sont convaincus que certaines candidatures n’ont qu’un but de sabotage. Trop de choses se disent à Mohéli à ce sujet. Pour preuve, médusés, les Mohéliens ont vu Mourdi Madihaly dit Sow, parfaite sosie en plus jeune de l’acteur Danny Glover, se faire inscrire sur les listes électorales de Foumbouni en Grande-Comore tout en déposant sa candidature pour le Gouvernorat de Mohéli. Quand sa candidature a été invalidée, l’homme de Hoani a crié au «complot». Or, lui-même avait été accusé de comploter puisque, selon Radio Cocotier, sa candidature ratée aurait été stimulée, encouragée et financée par tel colistier mohélien de tel candidat grand-comorien à l’élection présidentielle qui veut priver Mohamed Larif Oucacha de sa base électorale de Mbatsé et Hoani. La chose se dit, se chuchote, se murmure et se susurre par le Tout-Mohéli et dans le Tout-Mohéli.
À Salamani, banlieue de Fomboni, les processions de voitures ne finissent pas depuis le lundi 28 décembre 2015. Où vont-elles alors? La question ne se pose pas pour ceux qui savent que depuis la date indiquée, la Première Dame, candidate à l’élection gubernatoriale de Mohéli, s’y trouve. Elle reçoit délégation sur délégation. Elle sillonne Mohéli. En début de soirée, ce mercredi 30 décembre 2015, sous une pluie diluvienne et avec des chansons populaires bien choisies et des slogans, en tête de ses partisans, elle traversait la ville de Fomboni, faisant des pas de danse chez les habitants, qui dansent avec elles par la suite. La chose ne manque pas de piquant parce que le slogan le plus usité est «Pour l’instant, nous ne disons rien». Comme on n’est pas encore en campagne électorale, il n’y a pas de discours, mais juste quelques rencontres à domicile et quelques marches populaires. La marche populaire de Maman sur Fomboni a fait dire à cet habitant de Salamani: «Elle sait ce qu’elle fait et comment elle le fait. Elle va révolutionner la manière de faire de la politique à Mohéli et dans l’ensemble des Comores en période électorale».
Toujours est-il qu’à l’heure actuelle, personne ne sait dans quel sens évolue l’électorat de l’île de Mohéli, où la campagne électorale, non encore lancée, bat donc son plein. À Mnadzi Mmodja, dans une autre banlieue de Fomboni, il est des situations cocasses et pittoresques. Cette femme «démarchée» par un candidat dit: «Mon mari, mes enfants et moi-même, ça fait 10 bulletins de vote à glisser dans l’urne. Mais, tant qu’on ne m’a pas donné un congélateur, personne ne bougera de cette maison pour aller voter». Mais, ce qui fait rire le plus à Mnadzi Mmodja, c’est que des habitants disent ne même pas être au courant des élections à venir et ne même pas connaître le nom des candidats et des candidates. Ça promet… Et puis, il y a cette tendance à l’exagération qui fait qu’un seul village soit revendiqué par un tas de candidats comme «fief». C’est très comorien…
Par ARM
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© www.lemohelien.com – Mercredi 30 décembre 2015.