Saïd Larifou, pas amoureux de la présidence tournante
Le Président du RIDJA, contre cette modalité électorale
Par ARM
Soyons bons Princes, soyons bonnes filles, et reconnaissons d’emblée que la présidence tournante est un monstre ou un chérubin né sous la première kleptocratie du kleptocrate Azali Assoumani (1999-2006). Et, contrairement aux idées reçues, la présidence tournante n’est pas imposée par les séparatistes anjouanais des années 1997-2001, mais par la classe politique mohélienne, qui arbitrait le processus de réconciliation nationale en 2000-2001. Lors de la rédaction de la Constitution du 23 décembre 2001, la classe politique anjouanaise ne voulait même pas en entendre parler, puisque son acceptation de cette modalité électorale allait signifier ipso facto la reconnaissance de l’État comorien, son pire ennemi.
Pourtant, la Constitution du 23 décembre 2001 a été adoptée, et cela 4 jours seulement après le piteux et lamentable débarquement de mercenaires à Mohéli, qui allaient s’y faire tuer. Les Anjouanais finirent par accepter la présidence tournante, et ont même organisé l’élection primaire de 2006, plaçant à «Bête-Salam» leur poétique «apatrîle» français Ahmed Sambi, qui s’y était tellement plu qu’il s’était octroyé une année supplémentaire de pouvoir en toute inconstitutionnalité, et avait était devenu Grand-Comorien en 2015 pour tenter d’y retourner en 2016 puisqu’il ne pouvait pas attendre le tour d’Anjouan en 2021.
Aujourd’hui, il faut regarder la réalité en face. Cette réalité est simple, très simple: la Grande-Comore est la grande perdante de la présidence tournante. Pour nous en convaincre, il suffirait à peine de rappeler que les deux scrutins présidentiels non verrouillés par la candidature unique du Président sortant et par le «rattrapage ethnique» inhérent à la présidence tournante sont ceux de 1990 et de 1996. Or, au cours de ces deux élections, les 5 premiers candidats étaient grands-comoriens, pour d’évidentes raisons démographiques. Aujourd’hui, on demande à la Grande-Comore de ronger son frein pendant 10 ans dans chaque cycle de 15 ans. C’est la raison pour laquelle toutes les réclamations sur la suppression du fils béni ou maudit qu’est la présidence tournante viennent de la Grande-Comore.
D’ailleurs, le «concubinocrate» Azali Assoumani, lors de sa conférence de presse du 30 décembre 2015, à Fomboni, Mohéli, avait déclaré: «Pour la présidence tournante, j’ai l’habitude de recourir à une image chère aux médecins. Est-ce que le 3 D est ici, celui qui a les trois Doctorats? Quand on s’est fait une blessure par laquelle coule le sang, on pose ce qu’on appelle un garrot. C’est une solution destinée à empêcher provisoirement le sang de couler. Ce n’est pas le remède définitif, mais un procédé destiné à empêcher l’écoulement mortel du sang. Et quand on arrive en ville, en ce moment-là, on peut envisager d’autres solutions comme les sutures. Alors, au stade où nous étions en 1999, il fallait poser le garrot pour éviter l’écoulement du sang. […].
Quand on est dans une situation pareille, et dans l’attente de trouver la meilleure solution, nous aurions perdu beaucoup de temps dans la douleur. Et nous savons qu’il y a beaucoup de pays qui sont confrontés à des problèmes et qui, lancés à la recherche du système idéal, périssent. Nous avons opté pour la solution la moins mauvaise. Il y a la solution idéale et la solution la moins mauvaise. Comme tout le monde s’est mis d’accord que la présidence tournante est le système qui allait nous permettre de vivre ensemble, elle était la moins mauvaise». Autant lui dire que «le 3 D, celui qui a les trois Doctorats», n’en a pas trois, mais deux, qu’il est Docteur en Science politique et non en Médecine et qu’il avait assisté à son meeting, le même jour à la Salle multifonctionnelle de Fomboni, où il lui avait été présenté, mais n’avait pas pris part à la conférence de presse pour la simple raison qu’il était invité à Fomboni autour d’un succulent repas de banane et de poisson séché importé de Madagascar. Un homme sensé ne rate pas ce genre de repas pour une conférence de presse.
En d’autres termes, pour le putschiste multirécidiviste Azali Assoumani, la présidence tournante est une solution provisoire. Dès lors, une question se pose: comme il pouvait faire inscrire ce qu’il voulait sur sa Constitution, pourquoi n’y a-t-il pas précisé qu’à l’issue de l’essai de ce scrutin par les trois îles indépendantes, on allait le supprimer ou procéder à un référendum constitutionnel. Dire du bout des lèvres qu’à cette issue, on allait en faire un bilan est un procédé fumeux et vaporeux. La Loi est mieux applicable et appliquée quand elle est dénuée de toute ambiguïté. Mais, cela n’a jamais été le fort du constituant aux Comores.
Ahmed Sambi veut une suppression pure et simple de la présidence tournante, ayant la faiblesse de croire qu’en pareil cas, il lui suffirait de se présenter à tous les scrutins présidentiels pour devenir Président à vie, à mort et jusqu’à ce que mort s’ensuive. N’est-il pas beau et irrésistible? Le «concubinocrate» Azali Assoumani voudrait également voir disparaître cette modalité électorale, histoire de barrer la route en 2021 à Ahmed Sambi, son encombrant «allié circonstanciel de temps».
Or, aujourd’hui, c’est un acteur politique, qui a longtemps combattu les deux dictateurs poétiques qui parle de la suppression pure et simple du monstre ou ange. Il s’agit de Maître Saïd Larifou, Président du Parti RIDJA. Cette prise de position suscite les rumeurs les plus folles et les plus contradictoires. On se perd en conjectures. Les uns disent tout. Les autres disent n’importe quoi. Voici la déclaration de Maître Saïd Larifou qui a mis les feux aux poudres: «Après avoir terminé le cycle de cette tournante, on a tiré la conclusion selon laquelle ce système ne fait que plomber nos finances publiques au profit de certaines personnes, et nous lançons un combat politique pour sa mise à terme. Nous ne soutenons personne, mais nous adhérons à cette vision de l’émergence des Comores. Et si demain le successeur du président Azali souhaite poursuivre ce chemin de l’émergence, nous le soutiendrons pour l’intérêt de la population».
Maître Saïd Larifou embraye, et son réquisitoire ne peut que siffler aux oreilles des Anjouanais et des Mohéliens: «Il n’est un secret pour personne que le bilan de la tournante est catastrophique. Nos institutions ne sont pas favorables à nous et au développement harmonieux de notre pays. Bien au contraire, elles ont permis à certaines personnes de s’enrichir sur le dos du peuple. De ce fait, le RIDJA se livre au combat de la révision constitutionnelle et de l’abolition de la tournante».
Ici et là, tel augure de la vie politique nationale jure, la main sur le cœur, la larme à l’œil, la voix étranglée par l’émotion et tremblant des trémolos de la sincérité, que cette déclaration incendiaire a été faite à l’instigation du chef de la dynastie actuelle, le dictateur Azali Assoumani. Cependant, une question se pose: appartient-il à une seule formation partisane de faire le bilan de l’application de l’article-phare d’une Constitution? Il y a déjà eu le mouvement des «dinosaures» qui, au lieu de faire le bilan entièrement négatif de leur propre participation à la vie publique, exigent un bilan de la présidence tournante et des années d’indépendance. Quel est donc ce pays où chacun, au lieu de faire des propositions, veut que ce qu’il pense soit appliqué sur l’article d’une Constitution adoptée par voie référendaire?
Une chose est certaine: les Gouverneurs et les populations de Mohéli et d’Anjouan crachent par terre chaque fois qu’on prononce devant eux le nom du «ventriote» ventru, ventripotent et ventriloque Azali Assoumani. Dès lors, ce dernier ne pourra pas compter sur eux quand il voudra supprimer par la force la présidence tournante, qu’elle soit bonne ou mauvaise. D’ailleurs, celle-ci n’est ni mauvaise, ni bonne, mais appliquée par une bande de voyous incompétents corrompus. Une disposition constitutionnelle ne vaut que ce que valent ceux qui l’appliquent et, aux Comores, ces gens-là sont des canailles et des fripouilles.
Par ARM
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© www.lemohelien.com – Mardi 9 mai 2017.