• Home
  • /
  • actualite
  • /
  • Saïd Larifou n’a pas convaincu. Il doit revoir sa copie

Saïd Larifou n’a pas convaincu. Il doit revoir sa copie

Partagez sur

Il ne peut pas faire du neuf avec du vieux, le meilleur avec le pire

Par ARM

   Depuis avril 2015, Maître Saïd Larifou, Président du RIDJA, a fait le plus incongru des choix politiques, la plus déroutante des alliances politiques. Il s’est allié à Ahmed Sambi, avec qui il avait travaillé en vue de l’élection présidentielle de 2006, mais avec qui il avait rompu après avoir constaté, disait-il, que cet homme-là travaillait contre les Comores. Normalement, quand on conclut une alliance politique de cette nature, une alliance politique controversée par définition, l’exercice politique doit être précédé d’un vrai exercice pédagogique, et surtout, d’un travail d’enquête pour savoir ce que le peuple penserait. Or, il y eut un passage de force, et depuis, les photos montrant Maître Saïd Larifou aux côtés d’Ahmed Sambi et des crypto-sambistes ont littéralement envahi l’espace médiatique comorien, semant la confusion partout. Personne n’a compris ce revirement très spécial, un virage à 180 degrés qui a beaucoup étonné, stupéfait et pour tout dire dérouté et même indigné, faisant perdre à une certaine classe politique toute sa crédibilité, le peu de crédibilité qu’elle avait. Aujourd’hui, après le déluge d’indignation et de damnation, Maître Saïd Larifou a voulu rattraper la balle au bond, en accordant une interview à Karibu Mag. Néanmoins, son explication est pire que son manque d’explication parce qu’elle constitue un reniement total de tout, absolument tout, ce qu’il disait d’Ahmed Sambi, qui passe, dans sa propre bouche, du statut de démon à celui d’ange, du statut de destructeur des institutions et de l’État comorien lui-même, à celui de nouvel édificateur de la nation comorienne. Il fallait une forte dose de cynisme, de duplicité et de double langage pour en arriver là, mais il l’a fait.

   Quand le journaliste Ali Mmadi de Karibu Mag interroge Maître Saïd Larifou sur l’alliance qu’il a conclue avec Ahmed Sambi, le Président du RIDJA sort la plus inattendue des réponses: «Cette alliance fait de la défense de la démocratie, de l’unité nationale, les bases de sa philosophie d’action d’où l’appellation de “Rassemblement des Patriotes”». C’est très étonnant parce que, lors de l’interview qu’il nous avait accordée le samedi 14 décembre 2013, Maître Saïd Larifou disait exactement ceci: «Ahmed Sambi est un Comorien comme les autres. Il a des droits et des obligations envers la collectivité nationale. Dès lors, il doit faire en sorte de s’expliquer sur les sources de son enrichissement à la fois rapide et colossal. Quand il est devenu Président de la République en 2006, il avait à peine de quoi manger. Maintenant, il est devenu milliardaire. La décence voudrait qu’il s’explique sur l’origine de son enrichissement. Nous interpellons la France, Madagascar, la Tanzanie et les Émirats Arabes Unis pour qu’une enquête soit menée de manière approfondie et sérieuse sur l’origine de sa fortune. On doit connaître l’identité de ses prête-noms et le montant de leurs avoirs. Bien évidemment, il n’y a pas que lui. Il y a les autres aussi. Le système d’enrichissement illicite l’a beaucoup favorisé, lui qui s’est sucré sur le dos des Comoriens. Sous Azali Assoumani et Ahmed Sambi, les Comores ont enregistré une régression en matière de gouvernance et de démocratie. Mais, dans une remarquable dignité, les Comoriens ont démontré que l’argent ne fait pas tout. Ahmed Sambi a tout fait pour imposer Ikililou Dhoinine à la tête de l’État. Mais, comme Dieu est vraiment contre ses agissements, tous ceux dont il a favorisé la carrière, de Mohamed Abdouloihabi à Ikililou Dhoinine, ont fini par se séparer de lui, à le mépriser et à le détester. Il doit s’interroger sur les origines divines de ce rejet. En 2006, pour devenir Président, il disait être prêt à arracher et à jeter le collier de sa femme si ledit collier avait été touché par un acte relevant de la corruption. Dieu le punit pour ses mensonges, sa corruption. Il doit s’excuser devant Dieu et devant les Comoriens. Ces excuses valent plus que la constitution d’un Front républicain pour sauver le pays des agissements de cette personne. Il n’a réalisé aucun de ses projets. Il devait avoir la décence de se montrer plus discret et moins disert».

   Est-ce donc avec cet homme-là qu’il va défendre «la démocratie» et «l’unité nationale»? Il ne faut pas dire n’importe quoi aux Comoriens! Et puis, Maître Saïd Larifou persiste, prétendant, en ce qui concerne son alliance avec Ahmed Sambi: «Ce rassemblement dispose de moyens politiques et bénéficie d’un soutien populaire massif favorable à faire émerger une nouvelle vision et faire naître une vocation pour mettre un terme final à ces facteurs d’influence néfastes pour y substituer une approche transparente, avec la contribution active d’une nouvelle génération de dirigeants et le soutien des partenaires des Comores. Et cela dans un esprit d’égal à égal dans lequel les Comores se constitueraient des alliés de confiance afin de voir disparaître des réseaux d’influence néfastes. L’alliance est unie par cette vision assurément». Où a-t-il vu ce «soutien populaire» et ces «moyens politiques»? Comment peut-il «mettre un terme final à ces facteurs d’influence néfastes» en s’alliant à celui qui les fait émerger? Comment peut-il favoriser «une approche transparente» en s’alliant au champion de l’opacité? Comment peut-il faire «disparaître des réseaux d’influence néfastes» en faisant ami-ami avec le chef de ces mêmes «réseaux d’influence néfastes»? Comment Ahmed Sambi peut-il appartenir à la «nouvelle génération de dirigeants» après avoir ruiné les Comores?

   Comment Maître Saïd Larifou peut-il dire tout ça alors que les Comoriens et les amis des Comores connaissent sa critique cinglante, sanglante et saignante contre Ahmed Sambi, lors de la même interview du samedi 14 décembre 2013, quand il parlait de l’ancien Président dans de propos dépourvus de toute amphibologie? Pour ceux qui auraient oublié, voici ce qu’il avait dit d’Ahmed Sambi: «Il dit ça pour faire parler de lui, comme il est allé en Afrique du Sud, aux obsèques de Nelson Mandela, pour s’afficher auprès des grands de ce monde et essayer d’en tirer un profit politique. Il se sert donc de la mort et du deuil, sans vergogne. À l’étranger, il dit qu’il est toujours le Président des Comores. Ahmed Sambi est malade. Il n’est pas bien. C’est un châtiment de Dieu. Dire qu’il avait laissé dans les caisses de l’État 11 milliards de francs comoriens avant de quitter le pouvoir le 26 mai 2011, tout en se taisant sur un détournement de 200 millions de dollars, est un acte très grave. Il y a un problème Ahmed Sambi. Sa candidature en 2016 ne me fait pas peur. En 2010, il nous a volé notre victoire, et le reconnaît aujourd’hui. Aucun Comorien ayant des convictions n’a peur de lui. Au deuxième tour de l’élection présidentielle de 2006, j’ai contribué à sa victoire, et en 2010, j’ai contribué à sa chute, quand les Comoriens l’ont poussé par les fesses. Il m’a fait battre à mort à l’Aéroport de Hahaya, alors que je me rendais à Mohéli pour continuer à préparer sa chute peu glorieuse. Ses forces de répression étaient à deux doigts de me tuer. C’était une scène horrible et traumatisante. Compte tenu de sa posture psychologique, il faut l’ignorer. Il nous faut juste une vraie vision pour les Comores».

   Il a peut-être oublié ses propres propos, mais les autres ne les ont pas oubliés. Et ce n’est pas fini parce que, dans une autre interview, celle qu’il nous avait accordée le vendredi 21 février 2014, il disait au sujet de la présidence tournante, du maintien de laquelle il s’était engagé pour Mohéli-2010: «Je n’ai ni regret, ni remords pour mon engagement politique en 2010 en faveur de Mohéli car m’engager pour Mohéli, c’est m’engager pour les Comores dans leur ensemble». Or, aujourd’hui, pour faire semblant de favoriser les desseins personnels de son ami Ahmed Sambi, il est prêt à tout, allant jusqu’à déclarer: «Comme vous et nombre de nos compatriotes, je pense que l’un des principes de la présidence tournante fera nécessairement l’objet d’un débat national. Les pratiques politiques et institutionnelles récentes ont été néfastes par sa compréhension. La question est de savoir le moment approprié pour soumettre cette question à un débat national». Depuis quand, dans un État lance-t-on un «débat national» pour satisfaire l’égocentrisme démesurée et la mégalomanie narcissique d’un seul homme?

   Quand les choses arrivent à un tel point, il n’est pas superflu de rappeler que la première leçon que Maître Saïd Larifou et moi-même avons reçue lors des 2 premières minutes de notre présence à l’Université est: «La Loi est générale et impersonnelle». Autrement dit, on ne fait pas les lois à la tête du client, et au cours de ces 2 premières minutes d’Université, nos Professeurs ont beaucoup insisté en nous apprenant que «la Loi est l’expression de la volonté générale». Cela étant, les Comoriens ne comprendront jamais ce que nous leur disons si nous prétendons être des juristes mais ne voulons pas respecter ce que nos Professeurs nous ont enseigné avec amour. Cet enseignement-là est sacré et nous n’avons pas le droit de le trahir et de le dévergonder. Cet enseignement permet aux hommes de vivre en harmonie au sein de la société, sans affecter celle-ci par des troubles qui viendraient de l’importance excessive que les uns et les autres accorderaient à leur personne et à leurs intérêts personnels, au détriment du bien commun, qui unit tout le monde. En d’autres termes, Maître Saïd Larifou doit revoir entièrement sa copie parce qu’il n’a pas convaincu. Ce n’est pas avec le pire qu’il va produire le meilleur. Ce n’est pas avec du vieux qu’il va proposer du nouveau aux Comoriens.

Par ARM

Le copier-coller tue la blogosphère comorienne. Cela étant, il est demandé amicalement aux administrateurs des sites Internet et blogs de ne pas reproduire sur leurs médias l’intégralité des articles du site www.lemohelien.com – Il s’agit d’une propriété intellectuelle.

© www.lemohelien.com – Jeudi 13 août 2015.


Partagez sur

Laisser un commentaire

Time limit is exhausted. Please reload CAPTCHA.