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Aux Comores, qui est responsable et coupable de quoi?

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Aux Comores, qui est responsable et coupable de quoi?

Envisager la responsabilité et les culpabilités de façon systémique

Par ARM

     Quand on se rend aux Comores aujourd’hui, on n’a pas besoin d’un cours magistral doctement donné par un Professeur émérite barbu pour se rendre compte qu’il y a beaucoup de travail à y effectuer. Il y a des chantiers à lancer et d’autres à poursuivre. Des défaillances et des dysfonctionnements existent. Naturellement, tous les regards convergent vers l’appareil d’État, et il arrive que des gens sans scrupules, qui ont provoqué des faillites d’entreprises publiques et autres structures étatiques se donnent en spectacle pour essayer de donner des leçons dont ne veut personne. Du gnangnan. La démarche est scélérate et hypocrite. Pourtant, il serait sans doute temps qu’on se dise la vérité aux Comores. Pour preuve, et à titre d’exemple, quand on parle à ce haut fonctionnaire de Comores Télécom de l’utilité de faciliter les choses aux clients en instaurant un système d’abonnement au téléphone, il est catégorique: «Si c’est pour préparer une catastrophe économique, oui, nous pouvons l’envisager, mais nous ne pouvons pas nous permettre de l’envisager. Nous devons nous dire la vérité: dans ce pays, tant que les gens ne vont pas admettre l’utilité de payer leurs factures en temps et en heure, on pourra expérimenter toutes les théories éculées et celles en vogue, mettre au goût du jour toutes les recettes empiriques, réalistes ou démagogiques, et rien ne marchera. Nous perdrons notre temps. Ça serait très facile d’envisager le système d’abonnement au téléphone, mais rapidement, nous nous retrouverions avec des milliards de francs d’impayés. Nombreux seront les clients qui “oublierontˮ de payer leurs factures. Commençons par la reconnaissance de la culture de la facture à payer. C’est une vraie culture et nous devons l’intégrer dans nos mœurs».

     Le même problème se pose du côté de la MAMWÉ, l’entreprise publique chargée de la production et de la distribution de l’eau et de l’électricité. En effet, la MAMWÉ n’est pas seulement misérable; elle est aussi surtout misérabiliste. Aujourd’hui, la MAMWÉ est incapable de payer le prix d’un poulailler et même d’un œuf pourri. Il est vrai que la gestion de cette entreprise d’État n’est pas un exemple à suivre les yeux fermés, mais tout de même. On connaît les membres du personnel qui rentrent à la maison avec des bidons de carburant, alors que la Direction parle de pénurie de carburant. On connaît les sabotages systématiques et répétés pour faire accuser l’État de tous les maux de la Terre, en commençant par l’incompétence criminelle et l’insensibilité face aux souffrances de la population. On connaît les effets néfastes d’un personnel pléthorique et improductif, recruté au petit bonheur la chance. On connaît les membres du personnel qui, bénéficiant de la gratuité de l’eau et de l’électricité, vendent ces dernières à une clientèle propre, qui ne verse pas un centime à l’État mais à cet employé de la MAMWÉ. En même temps, on constate que de nombreux clients non fidélisés par le personnel indélicat de la MAMWÉ ne paient pas leurs factures, et sont dans la rue pour donner des leçons, dans une hypocrisie totale. Comment donc une société doit être rentable alors qu’elle est soumise à tous ces malheurs? Impossible.

     Et, il y a le problème de l’eau. Tout le monde en parle. Pourtant, à Mohéli et à Anjouan, on peut en consommer des quantités astronomiques et payer un simple forfait mensuel. Ce forfait mensuel est de 500 francs comoriens (presque 1 euro) par mois, même si on peut se poser la question de connaître les raisons pour lesquelles il peut y avoir des coupures d’eau à Mohéli, ou dans certaines régions de l’île! C’est ainsi qu’à Mohéli, ce vendredi 30 octobre 2015, en pleine nuit, on a vu des femmes de Djoiezi partir se laver chez une amie à Fomboni. Quand on leur pose la question sur leur «pèlerinage de salubrité ambulante», la réponse est assommante: «Cela fait 4 jours que les robinets de Djoiezi sont morts, sans une goutte d’eau». La chose fait vraiment pitié parce que, arrivées à Fomboni, on leur apprit que la capitale mohélienne venait juste d’être privée d’eau. Et comme ces femmes devaient assister à une cérémonie de mariage la même nuit à Djoiezi, on peut aisément imaginer leur déception. Ces petits détails tuent. Mais, pourquoi toutes ces pénuries d’eau à Mohéli? La réponse est limpide: parce que la clientèle politique de ces Messieurs les dirigeants, une clientèle politique d’origine anjouanaise qui peut égorger qui elle veut devant 1.000 témoins sans provoquer la moindre réaction de la part de ce qui tient lieu de pouvoirs publics, est en train de faire disparaître la végétation mohélienne, surtout aux bordures des cours d’eau. Les autorités et la classe politique de l’île s’en moquent comme de leur premier mensonge de Paradis sur Terre. Les scélérats! Donc, ce n’est pas le gouvernement qui se livre à de telles vilénies, mais des Anjouanais de Mohéli protégés par une classe politique désespérée et désespérante. Énervante aussi. Cela étant, quand l’ami Mohamed Saïd Fazul parle de la nécessité d’«intégrer» les Anjouanais dans la société mohélienne, on veut bien se donner la peine de l’écouter et d’essayer de comprendre, mais est-ce que les Anjouanais de Mohéli eux-mêmes se donnent les moyens de «s’intégrer» dans la société mohélienne? Naturellement, non. Ils se contentent de se faire haïr par des actes inciviques et malheureux, et personne n’a le droit d’en parler, puisqu’il faut rester dans le politiquement très correct.

     Faisons un petit tour au chantier du nouvel aérogare de Mohéli. La partie qui est construite fait plaisir à voir. Les Mohéliens en tirent une grande fierté parce que cela fait des décennies qu’ils réclament leur aérogare, celui qui existe depuis des décennies ressemblant à un vieux donjon pour tortures du Moyen-Âge. Mais, les Mohéliens sont en même temps furieux: les Anjouanais protégés par la classe politique ont envahi la piste de l’aéroport, y ont construit leurs maisons, et ont découpé morceau par morceau le grillage protégeant la piste. Et on est revenu au temps de Hamadi Mlatamou, quand, dans les années 1970, ce dernier, au volant d’une Jeep ayant fait les deux Guerres mondiales, sillonnait la piste de l’aéroport pour chasser les cabris, à l’approche de l’avion. Aujourd’hui, c’est pareil, et quand parle de protéger cette piste, les mêmes politiciens «protecteurs» veulent qu’on laisse en paix leur clientèle politique, à qui ils ont attribué des terrains du domaine public, sans avoir le droit.

     Pour sa part, et comme les Comoriens sont de grands consommateurs de riz, l’ONICOR fait rentrer de l’argent dans ses caisses. Pourtant, les Comoriens sont curieux de savoir pourquoi cette société construit des cages inutiles et inutilisables ici et là sans aucune autorisation gouvernementale, en dehors de toute prévision sur la loi des finances. C’est tout de même curieux. L’argent de l’État doit aller directement au Trésor public et non vers des projets inutiles n’ayant pas reçu l’aval du gouvernement.

     Aux Hydrocarbures, une nouvelle recette d’escroquerie criminelle a été inventée par certains membres du personnel: le mélange du gas-oil avec du pétrole lampant. Cela permet à certains malfrats de faire des économies sur le dos de la population. Ce triste et très lucratif «breuvage» fait escamoter les moteurs des voitures à une vitesse effarante, et on préfère regarder ailleurs pour ne pas constater certaines pratiques mafieuses.

     Naturellement, on regarde avec suspicion les dirigeants des entreprises publiques. Et quand on parle de l’incompétence criminelle de ces dirigeants d’entreprises publiques au Président Ikililou Dhoinine et de la nécessité de les changer, il dit: «Si c’est pour changer des dirigeants d’entreprises publiques qui ne veulent pas travailler par d’autres dirigeants d’entreprises publiques qui ne veulent pas travailler, je n’en vois pas l’utilité. Des changements de têtes ont été opérés. Ils ont donné quels résultats? Rien de bon. Donc, pourquoi devrons-nous changer d’hommes si aucun changement de mentalité ne s’opère. Nous devons envisager une nouvelle culture managériale, et celle-ci ne pourra être une réalité que si tout le monde est d’accord pour engager le pays dans la bonne voie». En tout état de cause, il ne serait pas superfétatoire de s’interroger sérieusement sur les 8 milliards d’argent public que 3 entreprises d’État ne versent pas au Trésor, même si des mesures spéciales sont prises par les pouvoirs publics pour éviter les malheurs de ce genre.

Par ARM

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© www.lemohelien.com – Mercredi 4 novembre 2015.


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