Pas de funérailles nationales pour M. Aboubacar Chamasse
Le poète qui psalmodiait le Coran inhumé sans présence étatique
Par ARM
«C’est qui, Salim Hatubou?», avait ingénument demandé Ikililou Dhoinine quand, en plein conseil des ministres, le mercredi 1er avril 2015, on lui annonça que l’écrivain comorien était décédé la veille. Naturellement, dans le régime politique des Mohéliens de Beït-Salam, personne n’avait eu le tact et l’intelligence de l’en informer avant pour qu’il puisse éviter le scandale d’ignorer le nom du plus grand écrivain comorien de l’époque contemporaine. Finalement, Salim Hatubou a eu des funérailles nationales, et les autorités comoriennes, dégoulinant d’hypocrisie grasse et huileuse, avaient été en grand nombre à Hahaya, son village natal, pour tenter de se racheter une conscience. Et voilà que Mohamed Aboubacar Chamasse vient de finir son existence terrestre. Dès le jour de son décès, son ami le Général Salimou Mohamed Amiri lui a rendu un hommage très appuyé, tout en soulevant un débat qui lui est dicté par sa parfaite connaissance des arcanes, bas-fonds et ressorts intimes de l’âme maudite des autorités comoriennes: «Est-il un héros national? Voilà un autre débat, qui en cache d’ailleurs un autre, non moins important, que je lance ici, et pour lequel tout un chacun peut donner son avis: Chammasse mérite-t-il des funérailles officielles? Il en aura bien sûr si nos gouvernants estiment qu’il leur est redevable de quelque chose. Une certitude cependant: Chammasse a tout fait pour n’être redevable que de lui-même, de son propre succès».
En réalité, Mohamed Aboubacar Chamasse est un héros national comorien. En réalité, Mohamed Aboubacar Chamasse méritait des funérailles nationales parce qu’il a été un très bon Ambassadeur des Comores dans le monde entier. En effet, il a représenté les Comores dans le monde entier, avec sa belle voix qui exprimait toute la bonté de son cœur. Voilà un homme né aveugle mais qui parlait cinq langues étrangères, alors que le «pouvoiriste» polygame Azali Assoumani est incapable de faire une phrase correcte en français, la langue de ses études, sa langue de travail. Mohamed Aboubacar Chamasse a représenté les Comores dans des concours de psalmodie du Coran en Arabie Saoudite, en Égypte, au Soudan et ailleurs. Sa voix était également destinée à la poésie. Il était un excellent poète. Il a été partout en Ambassadeur des Comores, mais que valent le talent et la compétence dans le pays de la médiocrité, là où on promeut les nullissimes pour piétiner les plus méritants?
Les Comores sont arrivées à un stade de leur Histoire où les personnes les plus dignes doivent établir des testaments pour refuser toute forme d’hommage national et de funérailles nationales. Les Comores sont devenues le pays d’une complaisance généralisée qui veut qu’on accorde des funérailles nationales à des criminels, mais on refuse le moindre hommage national aux Comoriens aimant leur pays. Plus grave encore, à quoi servent des funérailles nationales pour un héros national que l’État comorien s’est employé à ignorer et à mépriser toute sa vie durant? Nous avons tous assisté à la débauche d’hypocrisie qui avait conduit les autorités comoriennes aux funérailles de Madi Mbalia, grand nationaliste comorien, alors que, quand ce dernier avait besoin de l’État, il n’y avait personne pour penser à lui, pour penser aux traitements dont il avait besoin, pour penser à une pension de retraite digne de ce grand chantre de l’indépendance des Comores. Cela étant, le fait que Mohamed Aboubacar Chamasse soit inhumé dans sa belle de Mbéni ce lundi 12 septembre 2016 sans la présence d’une seule autorité comorienne en exercice n’est pas une chose de nature à étonner ceux qui connaissent le cœur noyé dans la noirceur d’autorités qui se moquent des vivants et qui n’ont rien à faire des morts.
Pour autant, Mohamed Aboubacar Chamasse n’est pas enterré dans l’indifférence, puisque ceux qui connaissent ses mérites, son talent et son humanisme ont assisté à ses émouvantes funérailles, et d’autres qui le traitaient en frère auraient voulu y assister mais ont été tenu à distance par la géographie, tout en étant en parfaite communion avec tous ceux qui lui sont chers et avec le défunt lui-même.
Par ARM
Le copier-coller tue la blogosphère comorienne. Cela étant, il est demandé amicalement aux administrateurs des sites Internet et blogs de ne pas reproduire sur leurs médias l’intégralité des articles du site www.lemohelien.com – Il s’agit d’une propriété intellectuelle.
© www.lemohelien.com – Vendredi 16 septembre 2016.