La tontine détruit la vie de milliers de Comoriens en France
Elle fait exploser des milliers de ménages et de destins aux Comores
Par ARM
Selon les îles, on l’appelle «Mtsango» ou «Chikowa». En français, on parle de «tontine», du nom du banquier italien Lorenzo Tonti (1602-1684). La tontine est une pratique sociale, financière et économique bien ancrée dans la mentalité comorienne, mahoraise et africaine, et qui ne doit rien à Lorenzo Tonti. Qui connaît Lorenzo Tonti aux Comores, à Mayotte ou en Afrique? Personne, et on s’en moque. C’est une association de personnes se trouvant unies par des liens de confiance, de famille, d’amitié, de travail ou d’appartenance géographique et qui, périodiquement mettent en commun une partie de leur épargne, en vue de financer des projets personnels ou collectifs, en mettant périodiquement le fruit de la cotisation à la disposition de chaque membre, par rotation. La périodicité de la cotisation, son montant et l’attribution de la somme collectée se décident d’un commun accord.
Dans certaines tontines, on retrouve parmi les membres la femme du dictateur et l’épouse du ministre. À Mohéli, pendant longtemps, la cotisation mensuelle dépassait rarement 5.000 francs comoriens, soit 10 euros. Mais, le vol de l’argent public par sac a fait changer la donne. Les enjeux peuvent désormais dépasser 10.000, voire 20.000 euros. Dans la grande communauté comorienne de France, cette petite plaisanterie peut atteindre 30.000 euros.
Tout ça est bien, et même très bien. Cela permet une relance de l’épargne, mais à quel prix? La tontine brise les ménages et les destins. Voici un couple comorien vivant en France et qui a des revenus salariaux de 1.300 euros et des allocations familiales de 300 euros, et qui épargne 1.350 euros dans la tontine. C’est sympathique de finir l’année avec une cagnotte de 20.000 ou 30.000 euros, mais pas en vivant dans la misère noire durant 12 mois par an, étranglé par la ceinture, par la bouche et par le portemonnaie. Quand on commet la bêtise de toucher le gros lot parmi les premiers bénéficiaires, on peut répugner à rembourser. La relance est toujours douloureuse, et peut donner lieu à des engueulades et autres accusations et injures. Que dire de ce couple vivant dans l’Essonne et qui a mis de côté 50.000 euros, en vivant dans la pire des misères noires, et dont le mari a volé l’intégralité de la somme pour aller se marier avec une Messaline de son village de Grande-Comore qui, après avoir fait main basse sur la somme en question, a chassé le rigolo? On en parle encore à Courcouronnes, Grigny et Évry, en crachant par terre…
D’accord, construire une belle villa au village d’origine en deux ans est une belle chose. Mais, pourquoi vouloir en construire une en se privant de vie? Il y a quelques jours, à Paris, un frère m’a parlé d’un homme surnommé «Djarifa», un mot qui signifie à Mohéli «Filet de pêche». Mon interlocuteur m’expliqua doctement: «Notre bonhomme est nu comme un ver. Il en est réduit à porter les slips déchirés de sa femme, slips dont les trous font penser à un filet de pêche». Charmant. Charmante mentalité. Mon interlocuteur ne m’a pas expliqué comment on connaît la nature des slips de l’autre.
Aux Comores, la tontine fait imploser les couples, homosexuels ou hétérosexuels. En France, certains ne se portent guère mieux. Pourtant, il y a une solution très simple: réduire le montant des cotisations, en le ramenant à une somme raisonnable, qui ne dépasse pas 150 euros, mais en augmentant le nombre des cotisants.
Par ARM
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