• Home
  • /
  • actualite
  • /
  • Il y a 48 ans, l’admission irrégulière et illégale des Comores à l’ONU

Il y a 48 ans, l’admission irrégulière et illégale des Comores à l’ONU

Partagez sur

Il y a 48 ans, l’admission irrégulière et illégale des Comores à l’ONU

La résolution 3385 (XXX) du 12 novembre 1975 viole la Charte de l’ONU

Par ARM

      Le 12 novembre 1975, il y a 48 ans, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté la résolution 3385 (XXX) pour admettre les Comores comme État membre des Nations Unies, par reconnaissance de leur indépendance et de «la nécessité de respecter l’unité et l’intégrité territoriale de l’archipel des Comores, composé des îles d’Anjouan, de la Grande-Comore, de Mayotte et de Mohéli, comme le soulignent la résolution 3291 (XXIX) du 13 décembre 1974 et d’autres résolutions de l’Assemblée générale». Auparavant, le 17 octobre 1975, par la résolution 376, «le Conseil de sécurité, ayant examiné la demande d’admission des Comores à l’Organisation des Nations Unies, recommande à l’Assemblée générale d’admettre les Comores comme Membre de l’Organisation des Nations Unies». Le Conseil de Sécurité ne cite nulle part les îles censées constituer les Comores, Mayotte ayant d’ailleurs choisi la France. Il recommande à l’Assemblée générale l’admission des Comores à l’ONU. C’est tout.

      Donc, la résolution 3385 (XXX) du 12 novembre 1975 viole le Droit international public car, aux termes de l’article 4 § 2 de la Charte des Nations Unies, «l’admission comme Membres des Nations Unies de tout État remplissant ces conditions se fait par décision de l’Assemblée générale sur recommandation du Conseil de sécurité». L’Assemblée générale n’a pas le pouvoir de définir les frontières des États et leur composition. Elle proclame l’admission de l’État à l’ONU, suite à la recommandation du Conseil de Sécurité. C’est tout.

      Le Conseil de Sécurité joue le premier rôle, l’Assemblée générale entérine ses recommandations. Il donne des ordres à l’Assemblée générale. Fait juridique édifiant, suite à la résolution 296 J (IV) du 22 novembre 1949 par laquelle l’Assemblée générale posait à la CIJ la question de savoir si un État pouvait être admis comme membre des Nations Unies «lorsque le Conseil de sécurité n’a pas recommandé son admission, soit parce que l’État candidat n’a pas obtenu la majorité requise, soit parce qu’un Membre permanent a voté contre la résolution tendant à recommander cette admission», la Cour internationale de Justice (CIJ) a rendu l’avis consultatif du 3 mars 1950, en répondant par la négative. La CIJ a ainsi reconnu que le Conseil de Sécurité joue le rôle principal dans l’admission des membres à l’ONU (CIJ: Compétence de l’Assemblée générale pour l’admission d’un État aux Nations Unies. Avis consultatif du 3 mars 1950, Recueil des arrêts, avis consultatifs et ordonnances, Recueil 1950, La Haye, 1950, pp. 1-11).

      Pour la CIJ, «la Cour n’a aucun doute quant au sens de ce texte. Celui-ci exige deux choses pour que soit effectuée l’admission: une “recommandation” du Conseil de Sécurité et une “décisionˮ de 1’Assemblée générale, la recommandation devant, par la nature des choses, précéder la décision. Le terme “recommandationˮ et le terme qui le précède, impliquent l’idée que la recommandation sert de support à la décision d’admission, que celle-ci s’appuie sur la recommandation. Ces deux actes sont indispensables pour former le jugement de l’organisation auquel se réfère le paragraphe précédent de l’article 4. Le texte ici considéré signifie que l’admission ne peut être décidée par l’Assemblée générale que sur recommandation du Conseil de Sécurité ; il fixe le rôle respectif des deux organes dont l’action concordante est exigée pour que soit effectuée l’admission: en d’autres termes, la recommandation du Conseil de Sécurité est la condition préalable de la décision de l’Assemblée par laquelle se fait l’admission» (pp. 7-8). Donc, l’Assemblée générale doit se conformer scrupuleusement à la recommandation faite par le Conseil de Sécurité.

      Toujours, selon la CIJ, «les organes auxquels l’article 4 a confié le jugement de l’Organisation en matière d’admission ont constamment interprété ce texte en ce sens que l’Assemblée générale ne peut décider une admission que sur la base d’une recommandation émanant du Conseil de Sécurité. En particulier, le Règlement de l’Assemblée générale ne prévoit l’examen au fond et la décision sur l’admission que “si le Conseil de Sécurité recommande l’admissionˮ (article 125). Le Règlement ajoute seulement que, si le Conseil de Sécurité n’a pas recommandé l’admission, l’Assemblée générale peut renvoyer la demande au Conseil de Sécurité pour nouvel examen (article 126)» (p. 9).

      Pour la CIJ, «reconnaître à l’Assemblée générale le pouvoir d’admettre un État comme Membre en l’absence d’une recommandation du Conseil de Sécurité serait priver le Conseil de Sécurité d’un pouvoir important que lui confie la Charte et réduire à peu de chose son rôle dans l’exercice d’une des fonctions essentielles de l’organisation. Ce serait admettre que le Conseil de Sécurité aurait seulement à faire une étude, à présenter un rapport, à émettre un avis, à formuler une opinion. Ce n’est pas ce que dit l’article 4, paragraphe 2. La Cour ne saurait admettre la suggestion, présentée dans un des exposés écrits soumis à la Cour, d’après laquelle, pour satisfaire aux exigences de l’article 4, paragraphe 2, l’Assemblée générale serait en droit de considérer l’absence d’une recommandation comme équivalant à ce que ledit exposé écrit qualifie de “recommandation défavorable”, sur laquelle elle pourrait fonder la décision d’admettre un État comme Membre de l’organisation.

      On s’est aussi référé à un document de la Conférence de San Francisco pour invoquer la possibilité d’une recommandation défavorable votée par le Conseil de Sécurité : en pratique, une telle recommandation n’a jamais été faite. De l’avis de la Cour, l’article 4, paragraphe 2, a en vue une recommandation favorable du Conseil de Sécurité, et cela seulement. Une recommandation défavorable n’est pas ce que prévoit l’article 4, paragraphe 2» (p. 9).

      La CIJ enfonce le clou: «En s’en tenant aux limites de la demande d’avis, laquelle concerne l’étendue des pouvoirs de l’Assemblée générale, il suffit de dire que nulle part n’a été conféré à l’Assemblée générale le pouvoir de rectifier jusqu’à le contredire le sens du vote du Conseil de Sécurité. En conséquence, rien ne permet d’admettre au profit de l’Assemblée générale le pouvoir d’attribuer à un vote émis par le Conseil de Sécurité le caractère d’une recommandation alors que ce Conseil a estimé que ladite recommandation n’était pas adoptée». (9-10).

      Dès lors, «la Cour, par douze voix contre deux, est d’avis qu’un État ne peut être admis comme Membre des Nations Unies, en vertu du paragraphe 2 de l’article 4 de la Charte, par décision de l’Assemblée générale, lorsque le Conseil de Sécurité n’a pas recommandé son admission, soit parce que l’État candidat n’a pas obtenu la majorité requise, soit parce qu’un Membre permanent a voté contre une résolution tendant à recommander son admission» (p. 10).

      S’en conformant, pour adopter sa décision du 30 décembre 1975 sur la loi 75-1337 du 31 décembre 1975 relative aux conséquences de l’autodétermination des îles Comores, le Conseil constitutionnel français avait consulté des experts en Droit international public, dont Mme Suzanne Bastid. Cette dernière avait soutenu ceci: selon l’article 4 § 2 de la Charte, le Conseil de Sécurité recommande à l’Assemblée générale l’admission d’un État au sein de l’ONU. L’Assemblée générale vote une résolution. Pour Mme Suzanne Bastid, la résolution de l’Assemblée générale invoque «la nécessité de respecter l’unité et l’intégrité territoriale de l’archipel des Comores, composé des îles d’Anjouan, de la Grande-Comore, de Mayotte et de Mohéli», se détournant de la recommandation du Conseil de Sécurité. C’est illégal. Selon Mme Suzanne Bastid, la France n’a pas fait usage de force lors de l’accession des Comores à l’indépendance le 6 juillet 1975, et a reconnu la décision de la Grande-Comore, Anjouan et Mohéli d’accéder à l’indépendance. Mme Suzanne Bastid soutient qu’«en Droit constitutionnel français, il est certain que Mayotte n’a jamais cessé de faire partie de la République française», et avait cité l’article 2 § 7 de la Charte: «Aucune disposition de la présente Charte n’autorise les Nations Unies à intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d’un État ni n’oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règlement aux termes de la présente Charte ; toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l’application des mesures de coercition prévues au Chapitre VII».

      Elle rappelle que «la reconnaissance par l’ONU d’un État dont le territoire fait juridiquement partie de la République française constitue un précédent extrêmement grave», et qu’«en Droit, si l’ONU a compétence pour reconnaître un nouvel État, elle n’a la possibilité de prendre aucune décision obligatoire en définissant la consistance du nouvel État» (Conseil constitutionnel: Rapport sur la conformité à la Constitution de la loi relative aux conséquences de l’autodétermination des îles des Comores, séance du 30 décembre 1975. Paris, 1975, p. 33).

      Pour le Conseil constitutionnel, «l’admission, décision dans la compétence de l’Assemblée générale, crée une règle de droit public international. Le passage sur l’intégrité n’en crée pas une ; il a juste le caractère d’un vœu ou d’une recommandation politique. Les Nations Unies elles-mêmes n’ont-elles pas consacré en 1961 le partage entre le Nigeria et la République Unie du Cameroun de l’ancien Cameroun sa tutelle britannique? Autres précédents de partitions acceptés : Fédération British West Indies, indépendance de la Jamaïque, etc.» (Conseil constitutionnel: Rapport sur la conformité à la Constitution de la loi relative aux conséquences de l’autodétermination des îles des Comores, séance du 30 décembre 1975, op. cit., p. 24 bis.

      Donc, les Comores revendiquent Mayotte sur la base d’une résolution illégale. Si quelqu’un conteste cette illégalité, engageons un débat juridique, plus utile que les affirmations hâtives et les injures rituelles de ceux qui savent ce qu’ils ne savent pas. Par ailleurs, le Suisse Max Huber soutient dès 1928 une thèse favorable à Mayotte, dans une sentence arbitrale restée d’une brûlante actualité juridique: «La souveraineté, dans les relations entre États, signifie l’indépendance. L’indépendance, relativement à une partie du globe, est le droit d’y exercer à l’exclusion de tout autre État, les fonctions étatiques. Le développement de l’organisation nationale des États durant les derniers siècles et, comme corollaire, le développement du droit international, ont établi le principe de la compétence exclusive de l’État en ce qui concerne son propre territoire, de manière à en faire le point de départ du règlement de la plupart des questions qui touchent aux rapports internationaux. […]. Si un différend s’enlève en ce qui concerne la souveraineté sur une partie de territoire, il est d’usage d’examiner lequel des États réclamant la souveraineté possède un titre – cession, conquête, occupation, etc. – supérieur à celui que l’autre État peut éventuellement lui opposer. Cependant, si la contestation est basée sur le fait que l’autre partie a effectivement exercé la souveraineté, ceci est insuffisant pour fonder le titre par lequel la souveraineté territoriale a été valablement acquise à un certain moment; il faut aussi démontrer que la souveraineté territoriale a continué d’exister et existait au moment qui, pour le règlement du litige, doit être considéré comme décisif. Cette démonstration consiste dans l’exercice réel des activités étatiques, tel qu’il appartient à la seule souveraineté territoriale»: Max Huber: Sentence arbitrale rendue le 4 avril 1928 entre les États-Unis et les Pays-Bas, dans le litige relatif à la souveraineté sur l’île de Palmas (ou Miangas), Cour permanente de Justice internationale (CPJI): Affaire de l’île de Palmas (ou Miangas), La Haye, le 8 avril 1928, pp. 8-9.

       Autrement dit, une présence ininterrompue et inscrite dans la durée (1841-2023) confère un titre de souveraineté nationale, s’il n’y a pas de contestation de la population locale (Mayotte réclame la France). En cas de contestation, c’est l’État le plus ancien sur le territoire qui l’emporte (la France. «L’État» indépendant des Comores n’a jamais dirigé Mayotte).

Par ARM

Le copier-coller tue la blogosphère comorienne. Cela étant, il est demandé amicalement aux administrateurs des sites Internet et blogs de ne pas reproduire sur leurs médias l’intégralité des articles du site www.lemohelien.com– Il s’agit d’une propriété intellectuelle.

© www.lemohelien.com – Lundi 27 novembre 2023.


Partagez sur

Laisser un commentaire

Time limit is exhausted. Please reload CAPTCHA.