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Fraude au Bac, délires du ministre de «l’Éducation»

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Le ministre de l’«Éducation nationale» vit encore au Moyen-âge

Par ARM

   Dans la matinée de ce vendredi 2015, le frère Soilihi Ali Mansouri nous a fait parvenir le message suivant, que nous devons lire avec attention, car il aborde un sujet très important, qui concerne tous les Comoriens: «ARM, as tu déjà vu un ministre de l’Éducation délirer? Ce vendredi, les candidats aux examens du Bac au niveau de la Grande-Comore reprendront l’épreuve d’Anglais. Et pour cause: des enquêtes menées par le ministère de l’Éducation confirment que cette épreuve a bel et bien été trichée, seulement au niveau de l’île de Ngazidja: “Des fortes suspicions portent sur la fuite du sujet de l’anglais et pour cela, j’ai pris la décision de refaire passer l’épreuve, le 10 juillet prochain. Cette décision est motivée par les rapports du président du jury de Ngazidja et des observateurs du ministère sur le terrain”, a déclare Monsieur le ministre. Et ce dernier d’ajouter: “Lorsque des irrégularités sont constatées lors des élections, des partielles sont organisées au sein de la circonscription où des problèmes sont constatés mais pas dans l’ensemble du territoire. C’est pour cette raison que nous avons décidé de faire repasser cette épreuve uniquement à Ngazidja”. Qui osera dire au ministre que c’est du pur délire, que Monsieur le ministre se trompe, que c’est vraiment utopique de comparer la fuite des examens du Bac à une irrégularité des élections? En effet, dans ce monde dominé par les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), on ne peut plus parler d’une fuite d’épreuve d’examen dans une seule île. Les téléphones et l’internet sont des moyens qui permettent de véhiculer le sujet triché d’une île à une autre en un laps de temps très court. C’est vraiment désolant d’apprendre qu’une telle décision a été approuvée par le gouvernement lors d’un conseil de ministres. Et une chose est sûre: si il y a eu fuite de l’épreuve d’Anglais, cela signifie qu’il y a eu une brèche sur la sécurisation des toutes les épreuves. Qui nous rassure que les autres matières n’ont pas subi cette fuite?».

   Compte tenu de l’énormité du scandale signalé par le frère Soilihi Ali Mansouri, il a fallu tout d’abord chercher le nom du ministre de l’Éducation nationale, de la Recherche (recherche de quoi, s’il-vous-plaît), de la Culture (Culture ou Inculture?) des Arts, chargé de la Jeunesse et des Sports (ouf! Ouf!). Le grand homme s’appelle Attoumani Ali, et les Comoriens sont heureux de l’apprendre. Naturellement, point n’est besoin d’être un grand spécialiste des questions d’Éducation nationale pour savoir que Soilihi Ali Mansouri a entièrement raison. Tout d’abord, il n’y a pas que l’épreuve d’anglais qui serait partie en vadrouille. Ensuite, il est stupide de croire que les élèves des autres îles sont dans l’ignorance de ces épreuves qui se promènent dans la nature. Qui plus est, comparer une fraude aux examens à une fraude électorale est d’une bêtise crasse. Enfin, l’annulation de toutes les épreuves sur toutes les îles s’impose. Le ministre de «l’Éducation nationale» n’a pas la preuve que la fraude s’est limitée à la Grande-Comore et à l’anglais. Cela étant, il serait utile de replacer cette fraude dans tout son contexte institutionnel, administratif, sociologique, social et historique comorien.

   En matière de fraude, rien ne doit nous étonner, quand on a vu un ministre de «l’Éducation nationale» signer de titres du Baccalauréat en s’attribuant le titre de «Docteur», alors qu’il a fait ses études dans une École normale supérieure, qui ne délivre donc pas de Doctorat.

   Remettons le curseur du temps sur 2012 et évoquons la fraude au Baccalauréat de la session 2011-2012, quand un doigt accusateur était pointé sur le ministre de l’Éducation nationale, de la Recherche, de la Culture et des Arts, chargé de la Jeunesse et des Sports (ouf! Enfin!) de l’époque, Mohamed Issimaïla (Ambassadeur en Arabie Saoudite depuis), dont le ministère couvrait des saletés répugnantes liées à cette fraude inqualifiable. Ce qui était vraiment grave, c’est qu’il ne s’agissait pas d’une fuite organisée par un fonctionnaire isolé et indélicat, mais d’un crime organisé, organisé en réseau, avec de vrais bandits installés au centre du pouvoir. On a assisté à une circulation d’argent sale, et certains partis politiques attribuaient la grosse magouille à leurs adversaires politiques. Allons, allons. Dès que l’Office des Examens aux Comores (ONEC) avait été placé à la marge, on savait qu’il y avait anguille sous roche. Mais, en fait d’anguille, il s’agit plutôt un requin. Il y a donc requin sous roche. Pour l’essentiel, le Baccalauréat comorien coûte entre 200.000 et 500.000 francs comoriens.

   Les autorités comoriennes vendent le Baccalauréat comorien aux Comoriens, et le passeport comorien aux étrangers. Les autorités vendent jusqu’à la souveraineté nationale et la fierté nationale. Elles vendent les femmes comoriennes comme esclaves à de Saoudiens vicieux et lubriques. Faut-il s’en étonner quand on connaît la structure mentale de ces autorités, ou plutôt leur absence de structure mentale? Ce qui est marrant – car nous n’allons pas en mourir, nous en avons vu d’autres – c’est que, dans un premier temps, la fameuse Commission de Prévention et de Lutte contre la corruption, n’avait pas bougé quand on lui a signalé les méfaits liés à cette triste affaire. Elle avait d’autres chats à ne surtout pas fouetter et on ne peut que l’en féliciter. Mais, face à la gravité des faits, elle était bien obligée de faire semblant de travailler. Elle est à féliciter pour son activisme et son zèle. Elle est gentille.

   Ce que toute personne sensée est incapable de comprendre est l’intrusion du Gouvernorat d’une Île, même autonome, celle de la Grande-Comore, dans un examen national – Insistons sur ce dernier adjectif. Fallait-il autonomiser la fraude aussi? L’affaire a été politisée, et pas toujours de la plus belle manière, mais il ne faut pas s’en étonner car quand on donne aux adversaires des armes, ils les utilisent. Voir le Commissaire à l’Éducation de la Grande-Comore, un Conseiller du Gouverneur de la Grande-Comore et le Directeur de l’Office des Examens de la Grande-Comore entre les mains des juges et en détention provisoire avait quelque chose de fou, de poignant et de scandaleux, mais ne sommes-nous pas aux Comores? «Bienvenue dans votre pays».

   Les manifestations d’indignation n’avaient pas manqué lors de cette grave affaire de grave corruption. Mais, est-il normal de s’indigner dans un pays où on a tendance à encourager tous ceux qui vivent de la corruption et dans la corruption? Aux Comores, qu’on l’admette ou non, on vit dans la culture de fraude et de triche. C’est facile d’envoyer derrière les barreaux des lampistes, qu’on libère au bout de quelques jours. Où sont les vrais tricheurs, ceux qui organisent la triche tout en restant à l’ombre? Qui est en mesure d’organiser des fuites de Baccalauréat? Des autorités supérieures. Au fait, que devient le digne Saïd Abdallah Rifki, depuis sa libération en héros, et son accueil comme le Messie par les siens devant la porte de la prison, avec des colliers de fleurs? Une honte nationale.

   Le Baccalauréat 2002 est le plus scanné de l’Histoire des Comores. Toutes les fausses photocopies étaient certifiées à l’ONEC, à Moroni, alors qu’il aurait suffi de vérifier le nom et le numéro pour se rendre compte qu’on était en présence de titres officiels usurpés. Pour aller plus loin, posons-nous la question suivante: combien de faux Baccalauréats a-t-on saisis aux Comores? Zéro. Allons encore plus loin. Partout aux Comores, ne retrouve-t-on pas certains des plus grands faussaires de diplômes des Comores, ceux qui connaissent le bazar aux diplômes de cette île, ceux qu’on ne saura jamais envoyer en prison car leurs faux diplômes ont été achetés et non scannés, et ont des numéros officiels, sur cette île, où ils sont répertoriés? Comment un régime politique comprenant en son sein de faussaires peut-il avoir le toupet de prétendre combattre des faussaires, et surtout comment peut-il le faire?

   On a vu, au Maroc, un étudiant comorien d’une École des Infirmiers dire à tout le monde qu’il était à la Faculté de Médecine. On a vu des étudiants comoriens inscrits à l’Université en France préparer un Diplôme d’Études supérieures (DÉS) ou un Diplôme d’Études approfondies (DÉA) crier sur les toits avoir un Doctorat ou un Doctorat de Troisième Cycle. Si tel devait être le cas, au Maroc, il y a des étudiants comoriens qui pourraient prétendre à 3 Doctorats car, avant d’être autorisés à s’inscrire en Doctorat d’État, ils ont eu à préparer, au préalable, deux DÉS, qui correspondaient chacun à un Bac + 8 (!), car il fallait un Bac + 8 au Maroc avant d’être autorisé à aller en Doctorat. Un Bac + 8 correspond à un Doctorat, et ces étudiants n’ont jamais présenté leurs DÉS sous l’appellation «Doctorat». Aux Comores, il y a même des gens qui présentent le «Doctorat de Troisième Cycle» comme le summum des Doctorats, comme s’il y avait un «Doctorat de Premier Cycle» et un «Doctorat de Second Cycle». Nous sommes donc dans une logique de fraude et de triche. On profite d’un système mal rôdé, dirigé par des corrompus et des ignorants pour frauder.

   Dans l’affaire de fraude au Baccalauréat 2012, la ville de Ntsoudjini avait été présentée comme l’épicentre de la fraude, car c’est le fief du Gouverneur Mouigni Baraka de la Grande-Comore, le plus grand boxeur-catcheur comorien de tous les temps.

   Alors, il ne reste qu’à présenter des félicitations au ministre Attoumani Ali, qui a la chance de vivre au Moyen-âge, quand le téléphone et Internet n’existaient pas, et quand on pouvait frauder l’épreuve d’anglais tout en laissant de côté les autres matières, quand les matières fraudées pouvaient se limiter à une île sans monter sur le dos d’un âne pour aller ailleurs.

Par ARM

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© www.lemohelien.com – Vendredi 10 juillet 2015.


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