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Un Musulman avait prié à l’Élysée devant le Président français

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Un Musulman avait prié à l’Élysée devant le Président français

Le Président Vincent Auriol avait respecté cette prière musulmane

Par ARM

       Une délégation de Chrétiens de Najran, au Sud de l’Arabie, avait été reçue à Médine par le Prophète Mohammed Ibn Abdallah. Lors de cette visite, elle devait célébrer le Dimanche des Rameaux, mais il n’y avait pas d’église dans la ville. Le Prophète dit à ces Chrétiens, des Ahl Al Kitab, «Les Gens du Livre», au même titre que les Juifs et les Musulmans, qu’ils pouvaient prier dans la mosquée la plus proche. Ce fut fait. Il n’y eut aucun problème pour cela. Aucun Musulman ne protesta et ne contesta cet acte de tolérance religieuse.

       En France, Vincent Auriol avait été Président de la République du 16 janvier 1947 au 16 janvier 1954. La scène suivante a eu lieu durant sa présidence. Elle est relatée par Louis Sanmarco, ancien administrateur français de colonies en Afrique et fondateur de l’Agence pour la Sécurité de la Navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASÉCNA): «À l’époque, l’administration envoyait chaque année un groupe de notables africains visiter la France. Cette année-là donc, Saïdou Nourou Tall [descendant du célèbre El Hadj Omar Tall] était du voyage, et le Président Auriol devait recevoir le groupe de notables en audience. En attendant, Nourou Tall avait déplié son tapis de prière dans le salon d’attente et s’était mis à faire sa prière, en bon musulman qu’il était, et cela juste au moment où la porte du Président allait s’ouvrir pour faire entrer les visiteurs. Guillabert tenta alors d’empêcher son ami de commencer sa prière, en lui disant: “Ce n’est pas le moment, voilà la porte du Président qui s’ouvre”. Sans se démonter, Tall lui rétorqua: “Tais-toi, tu ne connais pas les Blancs!”, et il continua sa prière. Le Président Auriol, qui était devant la salle d’audience ouverte, patienta calmement en disant: “Ne dérangez pas ce saint homme!”, avant d’aider Tall à se relever une fois la prière terminée. Se tournant vers Guillabert, Tall lui lança simplement, d’un air triomphant: “Tu vois!”»: Cité par Gouverneur Sanmarco et Samuel Mbajum: Entretiens sur les non-dits de la décolonisation. Confidences d’un Administrateur des Colonies, Préface du Président Abdou Diouf, Les Éditions de l’Officine, Paris, 2007, p. 221.

       Cette scène est émouvante, loin de l’intolérance «religieuse» qui détruit le monde actuel.

       Une question se pose alors: est-ce les Musulmans peuvent entrer dans une église avec des Chrétiens? La chose est rare et difficile, sauf quand il s’agit d’une initiative personnelle. Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, une grande cérémonie fut organisée à la cathédrale Saint Pierre de Rabat, le 16 septembre 2001, à l’initiative des autorités marocaines, en présence de dignitaires de différentes communautés religieuses, dont des Musulmans du Maroc.

16 théologiens marocains de «bonne réputation» avaient adopté une «fetwa», un lourd réquisitoire contre la cérémonie œcuménique du 16 septembre 2001 organisée à la mémoire des victimes des attentats du 11 septembre 2001. Cette «fetwa» interdisait au Maroc de s’allier aux États-Unis dans leur guerre, prévisible à l’époque, contre l’Afghanistan, et constitue une attaque virulente et inhabituelle contre le ministère des Habous et des Affaires islamiques, qui avait demandé aux «Imam» dans les mosquées d’exprimer la solidarité du Maroc envers les États-Unis. Quelques extraits de la «fetwa» sont à lire.

Dans le communiqué publié le 18 septembre 2001, les théologiens avaient martelé: «L’entrée du Maroc – gouvernement et peuple – est interdite dans l’alliance instiguée par les États-Unis contre le terrorisme, avec sa signification particulière aux critères doubles, et dans n’importe quelle alliance qui vise l’agression contre un groupe ou État musulman, et la particularité à ce genre d’alliances est un énorme péché, et même plus, c’est un reniement de la religion et une hérésie selon le Livre, la Sunna et le corps des oulémas». Pour les théologiens marocains, «[¼]l’entrée dans une alliance avec l’Amérique est un recours à l’impie contre le Musulman, et même pis, en ce qu’elle est une aide à l’impie contre le Musulman»: Ali Lmrabet: Les oulémas contre le pouvoir, Demain Magazine, Rabat, 6-12 octobre 2001, p. 5.

Sur la condamnation de la cérémonie œcuménique du 16 septembre 2001, lisons: «Nous déclarons l’interdiction de la prière de tout Musulman dans une église chrétienne, ou synagogue, par la pratique de leurs rites religieux, et qu’il s’agit là de l’un des plus grands péchés, et d’une violation des plus importantes institutions sacrées du Maroc, qui est un pays musulman, selon la Constitution, et la force de son Histoire depuis 13 siècles».

Contre le ministère des Habous et des Affaires islamiques: «Nous condamnons et nous nous élevons contre ce qu’a fait le ministère des Habous en matière de dévoiement des textes de juridiction islamique, et de la transformation du mensonge en vérité au cours du prêche politique du vendredi, imposé aux prêcheurs des mosquées marocaines, en date du vendredi 14 septembre 2001, à l’occasion de ce qui est arrivé en Amérique; ce qui constitue une atteinte à la liberté des imams et des prêcheurs des mosquées, et une falsification des paroles de Dieu Tout-puissant et de Son Prophète [¼]»: Ali Lmrabet: Les oulémas contre le pouvoir, op. cit., pp. 4 et 5.

Cette sortie était inattendue: «[¼] La plupart des signataires de la fetwa ne sont pas des islamistes radicaux ou des “égarés”. Ils ne sont pas non plus des illustres inconnus. C’est des notables, des prêcheurs et des enseignants dans des lieux prestigieux de l’Islam marocain, comme Fès, Tétouan ou Salé qui ont mis le feu aux poudres. Ce sont surtout des savants de l’Islam officiel qui sont à des années lumières des thèses islamistes défendues par cheikh Abdessalam Yassine, le guide spirituel d’Al Adl wal Ihssane. C’est pour cette raison que ce texte, on ne peut plus offensif, signé par 16 oulémas reconnus, est un accroc dans les relations entre le Palais et l’Islam officiel»: Ali Lmrabet: Les oulémas contre le pouvoir, op. cit., pp. 4 et 5.

Déjà, en 1990-1991, les théologiens du Maroc avaient dit tout le mal qu’ils pensaient de l’engagement de leur pays dans la coalition dirigée par les États-Unis contre l’Irak, un pays arabe et musulman.

L’acte des théologiens marocains est édifiant: «Conformément à une tradition répandue, dans les moments de crise, et en dépit des unanimités de façade ou dominantes par le haut, des voix minoritaires surgissent du fin fond de la société» et «déclarent illicite toute prière de Musulman au sein d’une église et l’allégeance aux Juifs et les inscrivent dans le cadre des grands péchés et des violations des valeurs sacrées du Maroc en tant que pays musulman, de par sa Constitution et son Histoire»: Maroc. Fatwa. Contre le Maroc officiel, les États-Unis et l’Occident, Le Journal Hebdomadaire, Casablanca, 6-12 octobre 2001, p. 7.

       Les réactions suscitées par la cérémonie diplomatique à la cathédrale de Rabat sont d’autant plus instructives que les théologiens frondeurs ont noté dans leur réquisitoire qu’ils «expriment leur consternation quant à cette catastrophe ayant touché le peuple américain, suite aux attentats qui ont visé Washington et New York, et appellent le gouvernement américain à chercher les causes de l’hostilité des peuples à son égard. Ils appellent, également, le gouvernement américain à réviser sa politique internationale afin de rétablir la paix et la sécurité en faveur de tous les peuples de la planète. Une affaire qui ne fait guère l’unanimité des oulémas, mais qui met au-devant de la scène des religieux qui reprennent à leur compte, à haute voix ce que d’autres pensent tout bas»: Maroc. Fatwa. Contre le Maroc officiel, les États-Unis et l’Occident, op. cit., p. 7.

       J’étais au Maroc lors de la révolte des théologiens, en septembre 2001.

       Je me souviens d’un Malien qui, dans le métro parisien, au moment d’aller au travail, à l’aube, priait à très haute voix devant une foule très diversifiée en races, religions, langues…

Par ARM

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© www.lemohelien.com – Vendredi 26 avril 2024.


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