Sambi, coupable de prière, de charisme et de popularité
Requalification politicienne des «troubles à l’ordre public»
Par ARM
Dans sa «note circulaire à l’attention des responsables de la sécurité et de l’ordre public» du 19 mai 2018 avec effet immédiat, Saïd Abdou Djaé, secrétaire général du ministère de l’Intérieur, violant la Constitution, la législation et la réglementation, a écrit: «Constatant que les agissements constatés ces derniers jours et en vue de préserver l’ordre et la sécurité publics, Monsieur Ahmed Abdallah Mohamed Sambi est placé en résidence surveillée. En cas de nécessité impérieuse de déplacement, l’intéressé est tenu d’introduire une demande auprès du département chargé de la sécurité publique». Depuis ce 19 mai 2018, l’ancien Président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi a été retiré de l’humanité, ne sortant plus, ne recevant les rarissimes visiteurs que sur les demandes que ses kidnappeurs daignent agréer.
Comme les motifs d’«ordre et sécurité publics» étaient vulgairement et bassement vils, le tyran Assoumani Azali Boinaheri a requalifié les faits par «corruption et détournement de fonds publics» liés à «citoyenneté économique», pour une tonne de billets de 100 dollars des États-Unis! Où est cette tonne de billets de 100 dollars? Où est le chèque correspondant? Où est le virement correspondant? Nulle part, car l’ex-Président n’a jamais détenu cet «argent» que les accusateurs n’ont même pas été capables de chiffrer, en ceci qu’il n’a jamais existé.
C’est un grave problème de Droit: la qualification, donc la détermination de la nature de l’infraction en Droit. La qualification judiciaire «est l’acte par lequel le juge vérifie la concordance des faits matériels commis au texte d’incrimination susceptible de s’appliquer»: Raymond Guillien, Jean Vincent et autres: Lexique des termes juridiques, 15ème édition, Dalloz, Paris, 2005, p. 507. Voilà ce qui s’est passé.
De façon imagée et très éloquente, «la qualification est au juriste ce que le diagnostic est au médecin. Le médecin relève les symptômes de son patient et, procédant à un rapprochement avec les symptômes recensés pour les diverses catégories de maladies, il va rattacher ceux de son patient à telle catégorie, à telle affection. Le juriste suit une méthode comparable: après avoir déterminé les faits de la situation, il va rechercher à telle catégorie et sous-catégorie ces faits se rattachent, de manière à déterminer quelle est la règle de Droit applicable à cette situation. Cette opération de diagnostic juridique est appelée qualification.
Par exemple, en matière pénale, le juge d’instruction saisi d’une affaire va rechercher si les faits reprochés à telle personne relèvent de la définition donnée par le Code pénal, d’une infraction: de l’abus de confiance, de l’abus de biens sociaux, de la corruption, etc.; ou encore de l’homicide involontaire, du meurtre (l’homicide est alors volontaire), ou de l’assassinat (meurtre avec préméditation). Suivant la qualification retenue, telle ou telle peine sera encourue»: Philippe Malinvaud et Nicolas Balat: Introduction à l’étude du droit, 21ème édition, LexisNexis, Paris, 2021, p. 49.
Toute qualification se fait en fonction de l’élément légal (ce qu’en dit la Loi), matériel (l’acte commis et interdit par la Loi) et moral (l’intention criminelle) de l’infraction.
Ayant quitté les Comores en novembre 2017, le Président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi y rentre en mai 2018. Il est accueilli à l’Aéroport de Hahaya par des milliers de Comoriens. Le vendredi 18 mai 2018, à midi, il prie à Moroni. Des personnalités sont venues de toutes les îles prier avec lui, ignorant et snobant ostensiblement le tyran Assoumani Azali Boinaheri, présent à la mosquée. À la fin de la prière, les fidèles présents lui font un assaut d’amabilité de sincère fraternité. Après ces civilités, Ahmed Abdallah Mohamed Sambi sortit de la mosquée, se trouvant devant 10.000 Comoriens, qui entonnèrent l’hymne national. Le lendemain, il fut emmuré dans sa résidence de Voidjou, privé de vie, d’humanité, de droits, de liberté sauf celle de mourir dans la solitude, loin de sa famille et du reste de l’humanité.
Mais, la dictature fut dépassée. Le tyran Assoumani Azali Boinaheri exigea un «Rapport parlementaire» à charge contre l’ancien Président. Deux Députés aux ordres se chargèrent de la besogne, l’attribuant à cinq Députés au total. Les trois autres Députés ont désavoué et rejeté publiquement ce faux «Rapport» rédigé à la dictée, truffé de mensonges honteux et illogiques, les 2 rédacteurs ayant réussi la plus grande prouesse universelle de tous les temps: inclure dans leur «Rapport» les conclusions de leur «voyage d’enquête» en Arabie avant de se rendre… en Arabie ou de parler même au téléphone avec les dirigeants des pays concernés!
En Droit, le juge a toute latitude pour qualifier ou requalifier les faits d’un procès. Dans un État où existe et s’applique le Droit – ce qui n’est pas le cas des Comores – la requalification se fait de façon constitutionnelle, légale, honnête, objective, impartiale et neutre. Or, celle du dossier vide et préfabriqué contre le Président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi a été faite en conseil des ministres, sur une base politicienne, loin du Droit et de l’équité, pour nuire.
Le Président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi est «coupable» d’avoir prié le vendredi à midi et d’être charismatique et populaire. Les Comoriens ont un mot pour charismatique: «Le Bien-aimé». Parfois, ils disent «Celui qu’on aime pour rien», mais les Mohéliens rétorquent: «On aime le sucre parce qu’il est sucré». Feu le Président Mohamed Taki Abdoulkarim était charismatique, mais le peuple ne lui manifestait pas son amour dans la rue. Dans le cas du Président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, des milliers de Comoriens aiment lui témoigner leur amour dans la rue. Que des fois, dans le taxi ou dans «le métro de l’océan», j’entends des Comoriens qui ne l’ont jamais vu lui reconnaître toutes les qualités, tous les honneurs, toutes les dignités! Non loin de chez moi, se réunissent l’après-midi des Comoriens qui ne se contentent pas de remuer le couteau dans la plaie en me jetant sadiquement à la figure la petitesse d’Ikililou Dhoinine et de Mohamed Saïd Fazul, mais en disant en plus que le Président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, qu’ils n’ont jamais vu, est le meilleur. J’entends encore ces enfants de 10-13 ans parler d’Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, qu’ils n’ont jamais vu, comme du Messie! Qui peut empêcher cet homme d’être ainsi aimé? Personne!
Le juriste, économiste et sociologue allemand Max Weber (1864-1920), étudiant les «trois types purs de domination légitime», cite «la domination rationnelle légale», «la domination traditionnelle» et «la domination charismatique». On n’est pas charismatique forcément pour ses travaux, pour ce qu’on a, mais pour ce qu’on est. Le meilleur planiste du développement d’un pays est rarement charismatique. Le charisme est un don et une chance. Il se définit: «1.- Qualités personnelles supposées d’un chef politique (éloquence, courage, capacité à séduire et à fasciner son entourage et ses électeurs…) permettant d’expliquer son autorité et les soutiens qu’il parvient à mobiliser dans l’espace politique. 2.- Chez Max Weber, la domination charismatique renvoie aux qualités extraordinaires prêtées au leader politique ou religieux. Elle repose sur la vertu héroïque, la valeur exemplaire ou le caractère sacré de celui qui exerce le pouvoir. Elle s’appuie sur la communauté émotionnelle des fidèles»: Olivier Nay et autres: Lexique de Science politique, 4ème édition, Dalloz, Paris, 2017, p. 69.
Le dictateur Assoumani Azali Boinaheri n’a toujours pas compris: il est le dirigeant le plus détesté et le plus impopulaire, quand Ahmed Abdallah Mohamed Sambi est le dirigeant le plus populaire, et à qui les Comoriens expriment le plus d’amour et d’attachement en public.
Par ARM
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© www.lemohelien.com – Samedi 30 octobre 2021.