L’Ambassadeur Badaouia Mohamed Fakih fait la manche
Par ARM
La méthode remonte aux années 1970, quand ce charismatique Président africain, soucieux de ménager l’avenir de son protégé et dauphin, accusé de multiples scandales politico-financiers, l’avait recommandé au Directeur d’une grande institution financière internationale pour qu’il se fasse oublier dans le froid de l’hémisphère Nord, avant de revenir sur la scène politique nationale. Notre homme partit en exil doré d’enfant gâté pour se faire oublier et pour se refaire une virginité politique, avant de rentrer chez lui, où sa carrière politique a été tout sauf une sinécure et une ligne droite. Comme les modèles qui réussissent sont ceux qui s’exportent le mieux, le Président Ikililou Dhoinine, bon Prince et magnanime comme tout, avait pris la décision d’éloigner des Comores son fidèle ami le Grand Docteur Badaouia Mohamed Fakih, avec qui il a étudié à la Faculté de Pharmacie de l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry. L’éloignement de l’enfant de Ntsoudjini, le fief du Gouverneur Mouigni Baraka de la Grande-Comore, le plus grand boxeur-catcheur comorien de tous les temps, était devenu une nécessité, à un moment où ça jasait sec sur sa participation dans la liquidation de la Pharmacie nationale autonome des Comores (PNAC), dans des conditions diaboliques, exactement comme Ahmed Sambi et Idi Nadhoim ont détruit l’Hôtel Galawa Beach, juste par simple lubie de détruire une infrastructure qui aurait dû être réhabilitée. Le plus flou dans l’affaire, c’est que l’immense et grandissime Docteur Abdoulkarim Mohamed, l’enfant chéri de Beït-Salam, lui aussi, était dans l’œuvre de destruction de la PNAC, et le Président Ikililou Dhoinine l’a gardé sous son œil bienveillant et protecteur, le faisant «élire» Député du Mbadjini-Ouest et le nommant ministre des Relations extérieures et de la Coopération chargé de la Diaspora, de la Francophonie et du Monde arabe (au secours! Au feu!), alors que le bonhomme n’a aucune compétence en diplomatie. Rien. Un pharmacien qui détruit les pharmacies aurait étonné s’il réussissait en diplomatie. Qu’on se le dise.
Pourquoi donc le Grand Docteur Badaouia Mohamed Fakih a été exilé à l’Ambassade des Comores à Dar-Es-Salam, Tanzanie, alors que l’immense et grandissime Docteur Abdoulkarim Mohamed, l’enfant chéri de Beït-Salam, est resté à Moroni, où il se la coule douce et voyage tout le temps aux frais de la Princesse? C’est un mystère. Pourtant, le Grand Docteur Badaouia Mohamed Fakih se plaisait à Moroni, où il aimait dire aux copines: «Vous savez, Ikililou est un frère, et ça ne date pas d’aujourd’hui. J’obtiens de lui tout ce que je veux. Il ne me refuse rien et il me reçoit sans rendez-vous, ni protocole. C’est un frère». Quand il sévissait à Moroni, un jour, il dit au Président Ikililou Dhoinine, parlant d’un solliciteur: «Celui-là est un voleur notoire. Il ne faut pas le prendre au sérieux». Le lendemain, l’individu qu’il avait désigné comme voleur lui glissa une grosse enveloppe d’argent dans la poche de sa veste à fines rayures qu’il affectionne tant, afin qu’il intercède pour lui auprès du chef de l’État. Ce qu’il fit, toute honte bue. Et là, le Président le regarda dans le blanc des yeux et lui lança avec une voix assez audible pour que l’intéressé, présent sur les lieux, puisse entendre: «Mais, qu’est-ce que tu me racontes? Il va falloir que tu saches ce que tu veux. Hier, tu qualifiais cette personne de voleur devant moi. Aujourd’hui, tu me dis qu’il est un ange. Dois-je te croire hier ou aujourd’hui? Je suis perdu dans toutes ces contradictions. Tu dois être cohérent». Le pauvre solliciteur entendit toutes ces amabilités sur lui. Passons.
Voici donc le Grand Docteur Badaouia Mohamed Fakih à la tête de l’Ambassade des Comores en Tanzanie. Ses nombreux ennemis l’accusent de choses pas belles et d’autres. Mais, cette fois, il ne s’agit pas d’accusations venant d’autrui, mais de sa propre main. En effet, le jeudi 18 juin 2015, le bon et Grand Docteur Badaouia Mohamed Fakih a adressé un courrier au Tout-Dar-Es-Salam sur lequel il a écrit, en anglais ce qui suit: «Objet: Parrainage de la Fête nationale des Comores. Nous sommes heureux et honorés de vous informer que notre pays, l’Union des Comores, se prépare à célébrer sa Fête nationale le 6-Juillet, pour le quarantième anniversaire de son accession à l’indépendance. Cela étant, l’Ambassade de l’Union des Comores à Dar-Es-Salam, République unie de Tanzanie, serait reconnaissante et très élogieuse à l’égard de tout contributeur et sponsor de l’événement. Nous vous présentons nos remerciements anticipés pour votre bonne compréhension». Sur la copie du message accompagnant cet article, on voit bien la mention manuscrite «Agree. Pay 2 millions Schillings», «Accepté. Payez 2 millions de schillings». Sur un deuxième document, on voit la liste des besoins de la mission diplomatique comorienne, une liste correspondant à 8.272.000 schillings de Tanzanie, mais aussi les coordonnées bancaires de la mission diplomatique. Un scandale!
C’est un énorme scandale! C’est un comportement scandaleux qui enfonce les Comores dans la fange et l’opprobre. Aucune Ambassade n’est obligée de célébrer une Fête nationale si elle n’en a pas les moyens. Aucun pays ne sera jugé à l’aune de la célébration de ses fêtes nationales par ses Ambassades. Par contre, le gaspillage est reproché aux pays du Tiers-Monde, et le regretté René Dumont, grand pourfendeur des bêtises des dirigeants africains et des dérives de la politique de coopération des grandes puissances envers l’Afrique, n’avait pas manqué de signaler dans sa lettre du 22 juin 1981 au président Abdou Diouf du Sénégal: «Votre prédécesseur avait en quelque sorte “francisé” le pays, dans son système d’éducation, son protocole, sa vie quotidienne. Compte tenu des difficultés économiques, il serait maintenant possible de réduire toutes les dépenses somptuaires (voyages à l’intérieur et à l’étranger, fêtes et réceptions, etc.). Les Italiens reçus avec un tel luxe à l’ambassade du Sénégal à Rome sont ensuite gênés, m’ont-ils dit, quand ils se battent pour une aide accrue au Tiers-Monde. Et les ministres sénégalais à Rome, à Paris, à New York ou ailleurs, ne connaissent que les hôtels de grand luxe. Ceci peut changer sans une “Révolution”. On pourrait aussi africaniser progressivement le protocole à la Présidence et pour l’ensemble des réceptions»: René Dumont: Pour l’Afrique, j’accuse, Plon, Collection «Terre humaine», Paris, 1986, p. 389.
Il fut un temps qui n’est pas vraiment lointain, l’Ambassade des Comores en France était peuplée d’une étrange faune qui s’était spécialisée dans la mendicité diplomatique, surtout auprès des chancelleries des pays arabes. Tel Ambassadeur avait obtenu la Médaille d’Or en la matière, et brillait par la manière qu’il avait à se faire accompagner de ce Conseiller, aujourd’hui en vagabondage administratif, à qui il avait acheté un ordinateur portable et à qui il jetait des miettes pour lui fermer la bouche. Mais, dès sa nomination à la tête de la vieille fille de la rue Marbeau, l’Ambassadeur Ahmed Bourhane avait tenu une réunion au cours de laquelle il avait martelé qu’il n’allait admettre aucun acte de mendicité de la part du personnel de la mission diplomatique. Il avait signalé la chose au Président Ikililou Dhoinine, qui lui avait dit: «Demande-moi ce qu’il faut pour faire fonctionner l’Ambassade parce qu’elle est notre visage en France. Je ferai ce que je pourrai, mais empêche la mendicité dans la mesure où elle constitue une saleté pour tout notre pays et notre peuple». L’Ambassadeur avait saisi cette occasion pour demander au chef de l’État des fonds pour rénover la vieille fille de la rue Marbeau, pour payer les charges impayées depuis des siècles des locaux diplomatiques comoriens en France et pour empêcher la vente du bel appartement de l’avenue Alphand, objet de nombreux fantasmes. Il va sans dire que les Comoriens de France seraient prêts à ramener de la nourriture de chez eux pour célébrer le 6-Juillet plutôt que de savoir que le chef de la mission diplomatique comorienne mendie pour faire la nouba. En son temps, Mohamed Elamine Soeuf (aujourd’hui portant un sombrero de dimensions pharaoniques au Kenya), alors Ambassadeur en Égypte, était le plus heureux des hommes quand il annonçait avoir fait le tour des Ambassades en tendant la main, notamment jusqu’à ce que les Émirats Arabes Unis financent les travaux de réfection de la chancellerie comorienne au Caire.
Il y a des années, alors que je soutenais un Mémoire de Troisième Cycle à la Faculté de Droit de Rabat, Maroc, j’étais mort de honte quand j’entendis un des membres du jury commencer son intervention par ces mots: «Les Comores sont un pays qui nous est cher, un pays membre de l’Organisation de l’Unité africaine, un pays membre de la Ligue des États arabes, mais un pays qui a des problèmes notamment pour payer le loyer du local de son Ambassade en Égypte». Qui avait dit cela à mon ancien Professeur d’Histoire des Idées politiques? En tout cas, pas moi. Donc, la diplomatie comorienne a intérêt à être propre.
Par ARM
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© www.lemohelien.com – Lundi 29 juin 2015.