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Assoumani Azali, chantre du «cens caché très visible»

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Assoumani Azali, le chantre du «cens caché très visible»

Obligation de résidence, obligation d’une nationalité unique

Par ARM

       Quand je m’étais inscrit à l’École doctorale de Science politique de l’Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne, le Directeur de cette prestigieuse École était Daniel Gaxie, un sociologue politique de renommée mondiale. Ses séminaires m’ont beaucoup appris. Daniel Gaxie a créé le «cens caché», qu’il applique aux démocraties, mais qui, en réalité, est d’application plus récurrente dans les dictatures tropicales, ces «Ripoux-bliques» et «Républiquettes» bananières sans la moindre tradition démocratique, dans lesquelles toute l’énergie des dictateurs de pacotille et de village est mobilisée et focalisée sur la conquête frauduleuse du pouvoir et sa conservation la plus violente, par les procédés les plus vulgaires et les plus contestables.

       Le «cens caché»: «Notion forgée par le sociologue politique Daniel Gaxie, permettant d’évoquer les formes cachées de ségrégation et d’exclusion politique dans les systèmes démocratiques contemporains. Elle témoigne notamment de l’inégale maîtrise, par les citoyens, des instruments de la participation politique (exemple: l’acte de vote, la prise de parole) et des connaissances propres au champ politique. Le terme suppose l’existence de mécanismes sociaux d’exclusion de certains citoyens (d’où le terme de “cens”, en référence au suffrage censitaire), au détriment de ceux qui ont de faibles ressources sociales, économiques et culturelles (niveau d’études). Cette exclusion se fait au bénéfice des professionnels de la politique, des classes supérieures et des partis qui les représentent»: Olivier Nay, Guy Carcassonne, Françoise Dreyfus, Olivier Duhamel, Josepha Laroche, Wanda Mastor, Johanna Siméant et Yves Surel: Lexique de Science politique, 4ème édition, Dalloz, Paris, 2017, p. 64.

       Mme Johanna Siméant, coauteure du Lexique duquel est extraite cette définition du «cens caché», avait été la Présidente du jury lors de la soutenance de ma Thèse de Doctorat à la Sorbonne. Quant à Mme Josepha Laroche, elle animait un séminaire que je ne ratais jamais.

       Oui, Daniel Gaxie aurait dû étendre le cens caché aux dictatures, prêtes au pire pour pratiquer l’exclusion de leurs propres citoyens du champ social et politique, et surtout du territoire national. Pourquoi évoquer le cens caché et parler de «cens caché visible»? Cette évocation est nécessaire pour montrer du doigt la brutalité et la vulgarité sans intelligence par lesquelles le dictateur Assoumani Azali Boinaheri personnalise chaque jour les Comores et leurs institutions publiques et politiques.

       Ceci est d’autant plus vrai qu’on est définitivement dégoûté en lisant l’article 6 de la loi du 22 décembre 2022, imposée à et par une Assemblée illégitime, en parlant des conditions à remplir pour être candidat à l’élection présidentielle: «Peut être candidat, le Comorien issu d’une autre île, mais qui a vécu d’une manière effective dans l’île où échoit la tournante durant au moins, les dix années précédant l’élection». On est horrifié en lisant l’article 7 de cette loi du crime par l’exclusion, la discrimination entre Comoriens et la ségrégation: «Les candidats à l’élection présidentielle doivent avoir résidé de manière permanente sur le territoire national au cours des douze mois précédant l’élection». En imposant un lieu de résidence aux candidats à une élection présidentielle, le dictateur Assoumani Azali Boinaheri viole un «droit constitutionnel universel», celui de la liberté d’aller et venir. On doit pouvoir résider à l’étranger et se présenter à une élection présidentielle aux Comores. Le dictateur Assoumani Azali Boinaheri n’a pas inventé le verrou électoral de la résidence, mais l’a renforcé au détriment du peuple, de l’État de Droit et de la démocratie. Je vis sur le territoire français depuis 2005, et rien ne devait m’empêcher de me présenter à une élection aux Comores, étant entendu qu’une loi scélérate imposée à et par des Députés illégitimes ne devait pas m’obliger de cesser de travailler à Mayotte, où je vis depuis 2017, pour aller végéter chez moi à Djoiezi «durant au moins, les dix années précédant l’élection» et «avoir résidé de manière permanente sur le territoire national au cours des douze mois précédant l’élection». Au lieu d’imposer une obligation de résidence aux candidats, il aurait fallu exiger des gens qui quittent leur île pour aller voler et semer la mort et la désolation sur les îles des autres de rester chez eux puisque partout où ils se fixent, ils se comportent en criminels broyés par la haine. Comment font-ils pour se faire rejeter partout sans comprendre qu’ils doivent arrêter leurs crimes?

       Et puis, il y a les élections présidentielles anticipées. Il y en a eu une en 1990 (la mascarade électorale d’Omar Tamou au profit de Saïd Mohamed Djohar) et celle de 1996 (la première élection présidentielle démocratique du pays). Comment les Comoriens peuvent-ils savoir par avance qu’il y aura une élection présidentielle anticipée à une date précise? Donc, l’obligation de résidence, même d’une semaine est un acte d’exclusion et de discrimination.

       Nous voici devant l’interdiction de la candidature de tout Comorien ayant une nationalité étrangère: «Si un candidat est titulaire d’une ou de plusieurs nationalités autre que la nationalité comorienne, il doit renoncer définitivement à sa ou à ses autres nationalités étrangères» au moment du dépôt de sa candidature. Ici et là, les commentateurs disent que les Comoriens installés à l’étranger ne doivent pas subir ce couperet parce qu’ils contribuent au financement de l’économie comorienne. En réalité, là n’est pas le problème. Les Comores de 2023 ne sont pas à l’époque du suffrage censitaire. On ne doit pas pouvoir être candidat à une élection présidentielle parce qu’on fait des transferts d’argent vers les Comores, mais parce qu’on est citoyen des Comores. C’est tout. La nationalité et la citoyenneté sont le cœur palpitant du contrat social. Je ne fais un transfert d’argent vers les Comores qu’en cas de vraie nécessité, même si l’état de délabrement du pays a créé la vraie nécessité permanente. Alors, est-ce que je dois être exclu du droit d’être éligible à un scrutin présidentiel aux Comores?

       En réalité, le dictateur Assoumani Azali Boinaheri est le chantre mondial de l’exclusion. En effet, dans le Préambule de sa «non-Constitution de la main coupée et de la mort» du lundi 30 juillet 2018, emporté par une folie hitlérienne, chantre du «Ein Folk, Eine Reich, Eine Fûhrer», «Un seul Peuple, un seul État, un seul Chef», le dictateur Assoumani Azali Boinaheri a osé parler de «cultiver une identité nationale basée sur un seul peuple, une seule religion (Islam sunnite) et une seule langue». Mes enfants, tous nés à l’étranger et ne parlant pas le mohélien, et n’ayant aucune nationalité étrangère, sont très contents d’apprendre qu’ils sont devenus des apatrides au motif qu’ils ne parlent pas «une seule langue».

       S’agissant de la religion, il s’agit d’une affaire personnelle, strictement personnelle: chacun a le droit de croire en Dieu, d’être animiste, athée ou agnostique. Le Coran est clair sur le sujet, et a créé entre 609 et 632 la laïcité et la liberté du culte:

«Nulle contrainte en religion! […]» (II, La Vache, 256)

«Dis: “Ô vous les infidèles! Je n’adore pas ce que vous adorez. Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore. Je ne suis pas adorateur de ce que vous adorez. Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore. À vous votre religion, et à moi ma religion”» (XIX, Les Infidèles, 1-6).

       Alors pourquoi un dictateur se croit-il avoir le droit d’imposer à la fois l’Islam, l’Islam sunnite, aux habitants des Comores, alors que non seulement la religion est une affaire personnelle, mais en plus, la liberté de culte a toujours été garantie aux Comores et ailleurs? Si un jour je veux devenir Musulman Chiite, personne ne me l’empêchera.

Par ARM

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© www.lemohelien.com – Lundi 16 janvier 2023.


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