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«Je n’ai jamais pu parler du dossier avec Ahmed Sambi»

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«Je n’ai jamais pu parler du dossier avec Ahmed Sambi»

Déchirant et poignant cri du cœur de Me Ahamada Mahmoud

Par ARM

     On aurait croire que l’histoire a pour théâtre une dictature sortie tout droit de l’imagination de l’écrivain britannique Eric Arthur Blair dit George Orwell (1903-1950), dans son livre 1984. Or, cette histoire de totalitarisme total est bel et bien basée sur la réalité. Elle a pour théâtre un pays appelé les Comores, en 2018. Elle a pour décor le lugubre, anticonstitutionnel et illégal placement en résidence surveillée d’Ahmed Sambi (Président des Comores de 2006 à 2011), et cela, non sur la base d’une décision de justice, mais par un simple acte administratif du secrétaire général du ministère de l’Intérieur. Il faut se rendre en Birmanie de la junte militaire pour constater de telles dérives totalitaires.

Pour rappel, alors qu’il se savait en grave danger de privation de sa liberté et même de sa vie, le Président Ahmed Sambi, qui était à l’étranger depuis novembre 2017, s’est rendu en toute connaissance de cause aux Comores en mai 2018. Alors qu’il aurait pu se rendre directement sur son île natale d’Anjouan via Nairobi et Dzaoudzi (Mayotte), il a débarqué à Hayaha, escorté par des milliers de Comoriens jusqu’à sa résidence de Voidjou, où l’attendait toute la classe politique comorienne. Il se rend à la Mosquée Al-Qasm de Moroni? Toute la notabilité de la Grande-Comore l’y attendait pour l’accueillir chaleureusement. Dehors, 10.000 Comoriens l’attendaient et avaient entonné l’hymne national. Très émouvant.

Quelques mois auparavant, alors que la dictature voulait le persécuter sur le dossier de la «citoyenneté économique», désormais vidé de sa substance par sa politisation plus que sale et excessive, il avait réclamé une séance publique pour que les Comoriens puissent prendre connaissance directement de ce qu’il avait à dire sur le sujet. Cela lui a été refusé alors que la bonne gouvernance tant prophétisée par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international réclame la transparence dans les affaires publiques. Pourquoi lui avoir refusé une séance publique, synonyme de transparence, qui aurait permis aux Comoriens d’en juger eux-mêmes? La «Ripoux-blique» de Mitsoudjé a peur.

Depuis le 19 mai 2018, le Président Ahmed Sambi est ignominieusement placé en résidence surveillée de la pire des façons. Maître Ahamada Mahmoud est son avocat. L’article 116 du Code de procédure pénale, rédigé en 1970, aux temps de l’administration française, lui donne le droit et la liberté de s’entretenir librement avec son client: «L’inculpé détenu peut aussitôt après la première comparution communiquer librement avec son conseil. Le juge d’instruction peut prescrire l’interdiction de communiquer pour une période de 10 jours. Il peut la renouveler, mais pour une période de dix jours seulement. En aucun cas, l’interdiction de communiquer ne concerne le conseil de l’inculpé». Le conseil de l’inculpé est l’avocat.

     Or, face à la presse, Maître Ahamada Mahmoud lance un cri du cœur: il n’a jamais pu parler «librement» avec son client, dans la mesure où un gendarme est toujours présent au moment de leurs rencontres et note tout. Ce sont des méthodes barbares qu’on ne retrouvait qu’en Birmanie de la junte militaire et au «Kampuchéa démocratique», où avait eu lieu un génocide ayant décimé 1,7 millions de personnes, soit 21% de la population nationale. Le gendarme présent vient se mettre aux côtés de l’avocat et de son client, prenant des notes comme un greffier lors d’une audience publique au Tribunal. Dans un État de Droit, cela ne se fait jamais. C’est de la barbarie et de la sauvagerie des siècles obscurs. De fait, Maître Ahamada Mahmoud et son client se limitent à des échanges de salutations venant de la famille du Président Ahmed Sambi et de ce dernier à sa famille. Les deux hommes n’ont jamais pu ouvrir le dossier et en parler. Ils se limitent aux salamalecs.

Face à la presse, Maître Ahamada Mahmoud dit des choses qui donnent froid au dos: quand il va voir son client, il ne peut jamais avoir avec lui le dossier, mais son téléphone portable et les clés de sa voiture. À quoi bon? Il lui arrive même de laisser son téléphone portable dans sa voiture. C’est une affaire très grave. C’est une affaire gravissime qui va au-delà de la personne du Président Ahmed Sambi, et qui touche tout Comorien, et même l’humanité entière. Une telle violation de la Loi n’a jamais été constatée aux Comores avant, même sous le régime politico-militaire des mercenaires. Le Président Ahmed Sambi peut-il avoir fait pire que les militants qui voulaient tuer Ahmed Abdallah Abderemane en 1985, et qui avaient été libérés pour la plupart un à un à la demande de la population? Quel est ce régime politique qui peut rester sourd à toute forme de justice et d’humanité?

Maître Ahamada Mahmoud lance un autre cri du cœur: quand il explique au juge d’instruction la violation de l’article 116 du Code de Procédure pénale des Comores, celui-ci pousse des cris d’orfraie et de vierge effarouchée, jurant qu’il n’a pas demandé la présence d’un gendarme dans l’intimité de l’entretien entre Maître Ahamada Mahmoud et son client, mais en magistrat corrompu, politisé et aux ordres, n’a rien fait pour demander l’arrêt de ces méthodes barbares. Maître Ahamada Mahmoud a même saisi la Cour suprême baisodrome de Cheikh Salim et de son amoureuse Armia Ahmed, mais aucune réponse ne lui parviendra.

Mesdames et Messieurs, quand le Droit et la Justice sont piétinés avec autant de barbarie, sauvagerie et suffisance, on n’est plus dans un État, mais dans une tyrannie médiévale dans laquelle le suzerain a droit de vie et de mort sur ses sujets, et un droit de cuissage sur toutes les femmes du pays. Une fois de plus, le juriste constate que les Comores ne sont plus un État et n’ont pas de Droit. Les Comores sont tout sauf un État, et ce qui s’y passe sont sans la moindre relation avec ce qu’on appelle communément le Droit dans les pays civilisés.

Rien dans la procédure engagée contre le Président Ahmed Sambi ne ressemble à du Droit. Qu’il ait été un bon Président ou pas n’entre pas en ligne de compte ici. Qu’il ait été ou non auteur d’injustices par le passé n’entre pas en ligne de compte ici. Ici, nous ne parlons pas de politique, mais de Droit. L’article 81 du Code de Procédure pénale des Comores dispose que «le juge procède, conformément à la loi, à tous les actes d’information qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité. […)». La vérité! Cela n’a jamais été le cas dans cette affaire. Les droits de la défense n’ont jamais été respectés, rendant impossible un procès équitable.

Le Président Ahmed Sambi est accusé de détournement de fonds et de corruption, qui ne sont pas des crimes, mais des délits. Or, aux Comores, il y a prescription des délits après cinq ans. Cela signifie qu’il ne peut pas y avoir de poursuites judiciaires cinq ans après la commission du délit. Or, en théorie, Ahmed Sambi ne peut avoir commis les délits qui lui sont reprochés qu’entre le 26 mai 2006 et le 26 mai 2011, quand il était au pouvoir. Juridiquement, s’il devait être poursuivi par la Justice, cela aurait dû se passer entre le 26 mai 2011 et le 26 mai 2016. Rien de tel n’a eu lieu. Donc, nous ne sommes pas dans une affaire judiciaire, mais dans une affaire politicienne habillée des vêtements usés d’une mauvaise Justice dont les acteurs n’ont cessé de manifester envers le Droit leur mépris et leur ignorance.

Comme cela a été annoncé sur ce site, tous les magistrats qui pervertissent le Droit et pourrissent la Justice aux Comores aujourd’hui sont ceux qui avaient été reçus à Mitsoudjé pour jurer fidélité au dictateur de village. Ce dernier tombera dans une mare de sang. Cela finira par arriver. Quand cela arrivera, les nouvelles autorités devront avoir à cœur de chasser de la Justice comorienne tous ceux qui l’avilissent aujourd’hui. Ce sont des bêtes sauvages.

Maître Ahamada Mahmoud n’a pas vocation à être un simple transmetteur de salamalecs entre son client et sa famille parce que la présence malsaine et indécente d’un gendarme rend impossibles les échanges entre l’avocat et son client. Qu’on se le dise!

Par ARM

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© www.lemohelien.com – Jeudi 29 novembre 2018.


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