L’opposition vise Mohamed Ali Saïd et oublie la Première Dame
Par ARM
Quand on a joué au ballon à la plage de Djoiezi et de Boingoma avec Mohamed Saïd Fazul, et quand on a étudié avec lui au Collège et au Lycée de Fomboni, on sait qu’il est un garçon sympathique et facile à vivre, même s’il n’est pas facile à suivre dans ses tribulations et convulsions politiques volcaniques, puisqu’il peut être avec Mohamed Ali Saïd, son ennemi intime et héréditaire, tout en étant viscéralement contre lui. Par la suite, il sera avec Ahmed Sambi tout en étant opposé à toute idée de placer «ses» candidats sous la bannière du même Ahmed Sambi. Et, ce n’est pas fini, on découvre chez mon ami Mohamed Saïd Fazul quelque chose qui fait penser à l’incorrigible académicien Mouigni Baraka Saïd Soilihi, dont personne n’a jamais su ce qu’il veut. Hamada Madi Boléro, qui connaît Mohamed Saïd Fazul comme s’il l’avait fabriqué de ses propres mains, dit de lui: «Le président Mohamed Saïd Fazul portait le surnom de “Non-aligné” depuis qu’il était élève au Collège de Fomboni; ses amis de la même promotion nous ont toujours expliqué qu’il s’arrangeait pour ne jamais avoir de position, pour ne jamais trancher»: Hamada Madi Boléro: Au service des Comores. Tome II. La renaissance, Éditions Cœlacanthe, Paris, 2015, p. 123.
Mon ami Mohamed Saïd Fazul est un garçon qui aime la victoire. Il aime lever les deux doigts sous forme de V, le V de la victoire. Toutefois, on peut se demander si parfois il ne fait pas le signe de la victoire prématurément et imprudemment. Qu’on s’en rende compte, tout de même! L’opposition mohélienne est en train de produire le plus larmoyant et le plus émouvant des discours pour dire que cette fois, elle ne va pas se présenter à l’élection du Gouverneur de l’île en ordre dispersé, mais va tout faire pour présenter une candidature unique. Ce qui est intelligent, compte tenu des résultats catastrophiques qu’elle enregistra lors de l’élection présidentielle de 2010, quand elle avait été incapable de présenter un seul candidat contre le Docteur Ikililou Dhoinine, qui lui dama le pion en leur faisant un formidable pied de nez. Pourtant, le bon Bianrifi Tarmindhi, en homme qui sait vivre, soutient avec une forte dose de mauvaise foi, de perfidie et d’angélisme que «ce n’est pas parce qu’on est parti en ordre dispersé qu’on a échoué à la présidentielle de 2010», insinuant perfidement que la multiplication des candidatures de l’opposition est une bonne chose, mais que le pouvoir politique en place avait son candidat de prédilection. Allons bon… La dispersion des candidatures n’est-elle pas l’une des causes majeures des échecs électoraux des partis politiques d’opposition dans nombre de pays d’Afrique? N’a-t-on pas vu l’opposition réussir dans d’autres pays d’Afrique quand elle arrive à faire taire les prétentions excessives de politiciens voulant tous présenter une candidature à une élection majeure face au candidat unique du pouvoir politique en place? Méditons sur ça.
Seulement, à l’heure qu’il est, l’opposition mohélienne n’a pas encore désigné son candidat. Or, l’homme Mohamed Saïd Fazul, challenger du candidat Ikililou Dhoinine lors de l’élection présidentielle de 2010, a déjà décrété qu’il serait candidat. Soyons logiques. Comment peut-on dire qu’on est candidat à une élection en tant que représentant unique d’une opposition qui jure désigner un seul candidat, qu’il n’a pas encore désigné? Il est vrai que le grand Mohamed Saïd Fazul est très fort, mais, là, il fait vraiment fort, très fort. Est-ce qu’en se disant déjà le candidat unique d’une opposition qui ne l’a pas encore désigné, le déroutant Mohamed Saïd Fazul ne prend pas le risque d’envoyer la fameuse opposition dans les choux?
La précipitation affichée par Mohamed Saïd Fazul tranche singulièrement avec le discours unitariste et conciliant des autres membres de l’opposition. Et, question zigzags politiques, le grand Mohamed Saïd Fazul n’a rien inventé, puisque son aîné, Mohamed Larif Oucacha, également ancien candidat à l’élection présidentielle de 2010, est un orfèvre. Lui aussi se dit indépendant de toute organisation politique, alors que ces derniers temps, il s’est souvent distingué en tant que crypto-sambiste, après avoir perdu son poste de Conseiller auprès du Président Ikililou Dhoinine, le cousin bien-aimé. Donc, comme l’ami Mohamed Saïd Fazul, il est avec Ahmed Sambi, mais sans être avec lui, puisqu’il se dit «indépendant». Cherchez l’erreur. Une fois de plus, on se rend compte que l’inégalable et inimitable académicien Mouigni Baraka Saïd Soilihi a fait des émules à Mohéli, au point de devoir breveter ses méthodes de roublardise politique et de contorsions politiciennes. Quand Mohamed Larif Oucacha escalade le mont Mlédjélé, prend un mégaphone et déclare de sa belle voix de Stentor que «nous nous faisons confiance, mais chacun a sa philosophie», et qu’«en démocratie, on ne peut pas avoir 100% d’adhésion», le Tout-Mohéli meurt de rire. Comme Mohamed Larif Oucacha, ancienne étoile polaire du firmament politique de Mohéli, a de la suite dans les idées, il pérore également en ces termes: «Notre souhait à tous est d’avoir une candidature commune, et pour cela, nous essayons de sensibiliser nos sympathisants qui, le plus souvent, ne comprennent pas et mettent la pression pour qu’on y aille». Chanson bien connue à Mohéli. De même, quand Saïd Dhoifir Bounou, candidat à l’élection présidentielle de 2010, installe une sono très puissante sur la falaise de Chilé pour crier haut et fort que «nous sommes obligés de nous faire confiance, il n’y a pas d’autres perspectives», et jusqu’à ce qu’il soit entendu à Handramavou et au-delà, le bon peuple de Mohéli soupire et attend la suite. Et c’est alors qu’entre de nouveau en scène le surdoué des surdoués, l’ancien Premier ministre Bianrifi Tarmindhi, lui aussi candidat à l’élection présidentielle de 2010. Bianrifi Tarmindhi est un acteur politique très calme, mais est capable des envolées lyriques les plus attendrissantes, surtout quand est à côté de lui l’irremplaçable Abdallah Saïd Sarouma, dit Chabouhane, dit Baguiri, dit Gris-gris. Cette envolée lyrique tropicale de Bianrifi Tarmindhi n’est pas la moins parlante: «Nous nous convergeons tous vers une alternance». En entendant ça, les Mohéliens versent des larmes d’émotion et disent: «Macha Allah», «Gloire à Dieu», comme les étudiants de ce pays d’Afrique qui se trouvent devant une belle fille qu’ils ne peuvent pas conquérir. Bon, vous savez que ce sont des choses qui arrivent.
L’opposition mohélienne est très touchante quand elle parle de son unité avant l’élection du Gouverneur de l’île. Mais, d’union, il n’y en aura point. L’opposition mohélienne n’est bonne que quand elle doit signaler une injustice, comme quand il s’agit de constater que Mohamed Ali Saïd a ruiné Mohéli ou de pousser, en 2010, Ahmed Sambi à organiser une élection de chef de l’État dont la tenue lui faisait autant de plaisir que la consommation d’un poison mortel et foudroyant. En même temps, cette opposition commet une grave erreur en termes de stratégie électorale parce que, tout en se préparant à faire échouer la candidature de Mohamed Ali Saïd, elle oublie qu’au cours de cette élection, le danger ne viendra pas d’un cadavre politique, mais de la candidature de la Première Dame, surnommée Maman, depuis qu’elle a opté pour le Gouvernorat de Mohéli et non pour la vice-présidence de la République. Cette opposition semble oublier que Maman ne se présente pas à cette élection pour aller faire de la figuration, mais pour tout faire afin qu’elle s’installe à Bonovo. Maman veut prendre la place du Gouverneur Mohamed Ali Saïd, mais de manière démocratique, jure-t-elle devant ses visiteurs et visiteuses du soir. Elle ne veut pas qu’on dise, au lendemain de l’élection, qu’on l’a placée de force au Gouvernorat. Or, si jamais elle gagne cette élection, certains à Mohéli et au-delà, seront tentés de le dire. Ce sont les Mohéliens qui vont élire leur Gouverneur, mais dès à présent, il est demandé deux choses: que l’État fasse le nécessaire pour assurer des élections démocratiques, libres et transparentes, et d’autre part, que les vaincus de demain se montrent dignes au lieu de chercher la petite bête, en adoptant un comportement de coupeurs de cheveux en quatre. Les Comoriens veulent du fair-play total et non des pleurnicheries larmoyantes.
Dans cette élection, personne ne va faire le jeu de l’autre. C’est un fait. Seulement, il y a deux facteurs principaux qui vont dominer cette élection. D’un côté, tout le monde veut que Mohéli change de Gouverneur, même les experts étrangers qui ont été confrontés aux vilénies et aux vulgarités de Mohamed Ali Saïd, qu’ils prennent pour un sauvage sans éducation, ni manières, un homme qui fait perdre à Mohéli des millions de francs de l’Union européenne en s’opposant fanatiquement et stupidement au choix par concours du chauffeur de cette organisation sur l’île, après avoir saigné à blanc cette pauvre île, au point de recevoir de ce journal des Pyrénées-Orientales le titre peu glorieux de «dictateur africain peu fréquentable». D’un autre côté, il faudra qu’on sache si l’île de Mohéli va jouer éternellement à l’alternance entre l’irascible Mohamed Ali Saïd et l’insaisissable Mohamed Saïd Fazul, qui a perdu Bonovo en 2007. Est-ce que Mohéli va se limiter au combat personnel entre ces deux hommes ou élargir le champ des possibilités? Une fois de plus, il faudra qu’on se dise la vérité: la souveraineté absolue du suffrage de l’électorat mohélien est sacrée et va produire des étincelles. Et, sur les autres îles, l’élection s’annonce également très rude.
Par ARM
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© www.lemohelien.com – Samedi 19 septembre 2015.