Glorieux vizir chargé des parkings de la République
Ministre des camions, taxis, bulldozers et tracteurs d’État
Par ARM
«Au-delà de certaines bornes, le ridicule ne tue plus… il conserve!»: Pierre Péan: L’argent noir. Corruption et sous-développement, Fayard, Paris, 1988, p. 203. Ce mot de Pierre Péan est rappelé au bon moment pour nous apprendre qu’à l’heure qu’il est l’ONU, l’Union africaine, la Ligue des États Arabes et le Mouvement des Pays Non-Alignés feraient œuvre utile en dépêchant dans les meilleurs délais aux Comores une Commission internationale de Lutte contre le Ridicule dans les Affaires publiques. Ceci est d’autant plus vrai qu’au train où vont les choses, bientôt, le «pouvoiriste» polygame Azali Assoumani Baba devra nommer un Premier ministre chargé d’obliger les hommes à appliquer des consignes sexuelles bien précises vis-à-vis de leurs épouses sous peine de castration et d’emprisonnement à vie. Oui, qu’est-ce qu’on ne verrait pas dans un pays où un Grand Vizir au titre ronflant et kilométrique est tellement «occupé» à redresser les affaires les plus urgentes de l’État qu’il se croit obligé d’en rajouter en signant des «notes circulaires» sur l’heure à laquelle les chauffeurs des voitures de l’État doivent monter au lit et s’étendre aux côtés de leurs chéries? De l’Égypte pharaonique au Royaume des Hittites en passant par l’Inde de la période des Lois de Manou, c’est la première fois dans l’Histoire «universelle de l’Humanité entière» qu’un Premier ministre devient un gardien de parking. Oui, le Premier ministre du régime politique du «pouvoiriste» polygame Azali Assoumani s’est mué en gardien du parking des taxis, tracteurs, camions et bulldozers de la République. Calomnies? Des clous! C’est la pure vérité.
En effet, dans sa «note circulaire» du 30 juin 2016, le vaillant et glorieux Premier ministre – que Dieu éclaire Son règne pour l’Éternité – écrit doctement: «Objet: Interdiction de la circulation des véhicules de service en dehors des horaires de travail. Mesdames, Messieurs. Il est informé aux agents de d’État [Sic: «De l’État»] et aux services de la brigade routière que la circulation des véhicules de service en dehors des horaires de travail est interdite sauf autorisation spéciale délivrée par le Vice-président et le ministre concerné. Cette mesure ne concerne pas les voitures de fonction. Les services de la brigade routière et les institutions de l’État sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’application stricte de cette note». Les Comores n’attendaient que cette «note circulaire» pour sortir du sous-développement, et c’est désormais chose faite.
Ah! Le grandissime, vaillant, glorieux, auguste et resplendissant Premier ministre! Ah! Le grand homme! Soyons sport. Oui, soyons sport parce que le grandissime Premier ministre vient d’inventer tout le Droit administratif universel. Oui, ce Premier ministre est un créateur de tout le Droit, et notamment du Droit administratif. Qu’on s’en rende compte. En effet, en Droit administratif, la circulaire est définie comme étant «un texte destiné aux membres d’un service, d’une entreprise, d’une administration» ou encore «une consigne sur le fond ou la procédure du service, rédigée par un chef de service à l’attention de ses subordonnés, et en règle générale, par un ministère (circulaire ministérielle) ou par plusieurs (circulaire interministérielle) à l’attention des services déconcentrés qui auront à l’appliquer». C’est clair: la circulaire est une mesure d’ordre interne, et quand on est en présence d’une circulaire interministérielle, cela signifie qu’elle a été rédigée d’un commun accord par deux ou plusieurs ministères, ce qui n’est pas le cas ici. Et en aucun cas, un ministre qui n’a pas autorité sur ses pairs ne peut rédiger un torchon dans le secret de son bureau et l’imposer à tous les autres ministres. Qu’on se le dise! Ça ne se fait pas.
Donc, le Premier ministre des parkings, tracteurs et bulldozers d’État doit savoir que sur le plan du Droit, son chiffon ne vaut pas le pet d’un lapin. Même s’il attribue à son torchon un autre nom, à partir du moment où il n’a pas autorité sur les autres ministres, il ne peut qu’appliquer sa petite sauce dans «son» propre ministère, laissant le soin aux autres ministères de signer des circulaires applicables à leurs administrations respectives. Et puis, strictement entre personnes de bonnes familles, retenons qu’un ministre n’a pas à signer des circulaires sur les heures auxquelles les chauffeurs de bulldozers et de tracteurs doivent faire dodo aux côtés de leurs copines de Mbachilé, Hamavouna, Sada ou Koki. Le ministre n’a pas à rabaisser son autorité à des salades de parking. À la limite, les Comoriens auraient compris si c’était le chef du parc automobile d’État qui s’occupait de ces petites choses. En d’autres termes, le Premier ministre a perdu une occasion supplémentaire de se montrer modeste, discret et efficace. Le coup d’éclat permanent finit par gâter la sauce. Qu’on le lui dise! Et on comprend l’agacement de ses collègues face à son invasion permanente dans leurs affaires.
Et il y a plus choquant. Le Premier ministre se place au-dessus des Vice-présidents, qui sont supposés être élus, même si on sait ce qu’il en est en réalité. En tout cas, bon courage dans la même tendance à l’exagération et à la recherche du ridicule et du pittoresque.
Par ARM
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© www.lemohelien.com – Jeudi 7 juillet 2016.